19 Avril 2021
Je l'avoue, chers amis, l'actualité m'ennuie partagée obsessionnellement entre l'épidémie de COVID, et la montée de toutes les violences, et ceci pas seulement en France.
Aussi ai-je essayé de trouver un autre sujet et j'ai choisi celui qu'indique le titre. L'universitaire Jean-Paul Brighelli a choisi le ton de l'humour pour presenter un phénomène plutôt grave de manière « attrayante ».
Voyez cela :
________________________________________________________________________________
The Atlantic Magazine, dans sa livraison de décembre, propose un long article intitulé : Why Are Young People Having So Little Sex ? En français courant : Pourquoi les jeunes baisent-ils si peu ?
La rédactrice, Kate Julian, explique — avec beaucoup d’humour — avoir été sidérée par les résultats des derniers sondages sur le sujet, — elle qui pensait que le temps présent, avec des applications comme Grindr (pour homos dragueurs) et Tinder (pour les autres obsédés), avec des pratiques comme le speed dating et l’amour kleenex, avec l’accès libre à des plateformes de pornographie gratuite, et l’hésitation sémantique entre « libertin » et « polyamoureux », était potentiellement un champ d’épandage infini de l’érotisme débridé.
Erreur fatale. Le temps présent est une ère d’abstinence.
Résumons en gros et en détail.
Les tabous pourtant sont tombés : le mot même de « perversion » n’est plus de mise, le BDSM s’affiche dans les films grand public, la sodomie est quasi obligatoire. Teen Vogue a publié un guide de l’intromission anale, avec schémas à l’appui et affirmations déculpabilisantes selon lesquelles « le sexe anal, quoique souvent stigmatisé, est une manière parfaitement naturelle de s’engager dans une activité sexuelle ». Si. Et cela remonte aux « anciens Grecs ». Révélation : l’amour platonique était également socratique…
N’empêche : en 20 ans, le pourcentage d’élèves de lycées qui font effectivement l’amour est tombé de 54 à 40%. Et ne croyez pas qu’ils ont davantage que leurs aînés recours à des dérivés type fellation — le pourcentage n’a guère varié. Résultat heureux, le nombre de grossesses non désirées dans cette tranche d’âge a diminué d’un tiers. Les associations américaines de lutte contre l’avortement s’en félicitent. Reste à savoir si ce soudain prurit précoce de puritanisme est un reflet de leur rencontre avec le Christ (ou avec Allah, les rapports sexuels hors mariage étant interdits en théorie par l’islam, non sans conséquences perturbantes), ou la conséquence de peurs nouvelles.
Les raisons de cette Nouvelle Abstinence sont multi-factorielles, comme on dit toujours quand on ne comprend pas très bien. Et elles ne concernent pas seulement la i-génération, celle qui est née avec un ordinateur greffé aux doigts : les tranches d’âge précédentes, y compris les Babyboomers qui se sont fait les dents, si je puis dire, dans la débauche générale des années 1970, forniquent moins que leurs aînés. Comme si l’Occident (les chiffres ne concernent que les populations de l’hémisphère nord), qui a déjà bien du mal à se reproduire, cessait progressivement de copuler par plaisir. Les perturbateurs endocriniens peuvent expliquer le taux élevé d’azoospermie ; ils n’expliquent pas — à moins de supposer une incidence directe des nanoparticules sur la libido — le renoncement aux joies du radada.
Autre hypothèse, avancée par Harvey Mansfield, professeur de science politique à Harvard et auteur de Virilité, qui vient d’être traduit aux Editions du Cerf (in le Figaro du 27 novembre) : « Les codes de harcèlement sexuel sont censés instiller en l’homme la peur de voir sa réputation ruinée ou de perdre son emploi. Le problème de cette approche est que vous ne vous contentez pas d’effrayer les prédateurs, mais que vous effrayez et éloignez l’homme que vous voulez le plus avoir à vos côtés. Les excès du féminisme créent aujourd’hui un nouveau puritanisme, qui remplace l’honneur et la vertu par la peur. » Dès lors qu’une femme affirme avoir besoin d’un homme comme un poisson d’une bicyclette, que reste-t-il de nos amours ?
Quant à l’illusion pornographique… J’ai déjà longuement expliqué — dans la Société pornographique — son effet pervers, qui pétrifie les jeunes (ma bite fait moins de 22 cm ? Ma poitrine s’obstine dans le 85 B ? Nous ne sommes pas normaux !) et codifie les comportements, en faisant croire aux moins informés que ce qui se fait à l’écran correspond à ce qui se fait dans la vie : calculez par exemple l’incidence minuscule du baiser ou des préliminaires dans les films pornos ! On procède à telle ou telle chirurgie plastique, on prend du Viagra alors qu’on n’en a pas besoin (les jeunes Américains étaient déjà 8% à en consommer en 2012, quand j’ai écrit mon livre, et en France, c’est à Paris — une ville qui n’est pas connue pour ses hospices de vieux — qu’on en consomme le plus), et on finit par s’abstenir tout à fait, de peur de ne pas être conforme aux codes institués par xhamster et Porn.hub. Le boom de la masturbation devant écran entraîne une déflation des vraies relations amoureuses.
Lire la suite si le sujet vous intéresse, en cliquant sur le LIEN
https://blog.causeur.fr/bonnetdane/les-jeunes-ont-le-sexe-en-berne-002510#ligne