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Le Scrutateur.

Blog destiné à commenter l'actualité, politique, économique, culturelle, sportive, etc, dans un esprit de critique philosophique, d'esprit chrétien et français.La collaboration des lecteurs est souhaitée, de même que la courtoisie, et l'esprit de tolérance.

Conseils aux jeunes candidats du prochain baccalauréat, après écoute d'une émission de télévision, consacrée à la mulâtresse Solitude.

1 ) Portrait imaginaire de la mulâtresse Solitude. 2 ) Le passage unique dans l'historiographie où il est question de Solitude.
1 ) Portrait imaginaire de la mulâtresse Solitude. 2 ) Le passage unique dans l'historiographie où il est question de Solitude.

1 ) Portrait imaginaire de la mulâtresse Solitude. 2 ) Le passage unique dans l'historiographie où il est question de Solitude.

C'était il a une dizaine de jours. Je sortais d'une courte, mais bien méritée, sieste.

Avant de me rendre au clavier pour « pondre » mon article du jour, je fis une ouverture sur une chaine de TV locale, histoire d'achever le réveil ou, qui sait, de m'ébaubir.

Fus-je ébaubi ? En tout cas suffisamment amusé pour en reparler aujourd'hui.

Sur l'écran, cet après-midi là, trois personnages.

D'abord l'animateur, dont j'oublie le nom, mais en tout cas d'origine africaine (récente), bien sapé, cravaté, et non dépourvu d'une assurance certaine.

Puis un metteur en scène de cinéma, guadeloupéen auteur de films comme Coco la Fleur, ou Vivre libre ou mourir qui fut sauvé d'un bide méroté par a seule interprétation éblouissante du personnage principal, j'évoque mon ami Ibo Simon. Il semble que notre réalisateur vient de produire un nouveau film sur un personnage "historique" : la mulâtresse solitude.

Présent sur le plateau un historien guadeloupéen que je peux me permettre de nommer car il a publié divers ouvrages dont le plus récent L'Eglise de Guadeloupe sous l'ancien régime colonial, 1635, 1850 (éditions SHG) mérite le détour, même si l'on peut contester certains points. Mais qu'est-ce qui n'est pas contestable ?

J'écoute donc avec intérêt et parfois un certain sourire.

L'animateur qui semble être un lecteur assidu de Wikipédia (c'est parfois risqué. Ainsi peut-on y lire : « La Mulâtresse Solitude (vers 1772 - 1802) est une figure historique de la résistance des esclaves noirs de la Guadeloupe. Elle fait partie des femmes dites « fanm doubout » et a été pendue à l'âge de 30 ans. Elle est un emblème de la Révolution contre l'esclavage en Guadeloupe, son île d'origine colonisée par la France. : https://fr.wikipedia.org/wiki/Solitude_(mul%C3%A2tresse) Sic!)  l'animateur donc, non sans lyrisme évoque la grande figure historique, et le metteur en scène intervient sous le même mode lyrique. « Mon grand père, dit-il, a parlé de cette grande femme héroïque dans un livre ».

C'est ici que que l'historien basse-terrien, M. Bélénus, jusqu'alors bienveillant et humble, intervient sans se départir de son humilité, pour dire qu'en vérité, on ne sait presque rien de madame Solitude, hors les quelques lignes qu'à écrite à son sujet l'historien Guadeloupéen Auguste Lacour, au quatrième volume de son immense (comme dirait Jacques Chirac, de tout et de n'importe qui, et ... quoi) Histoire de la Guadeloupe, qui fait autorité pour toute la comunauté des historiens véritables.

« Tu n'as pas lu le livre de ton grand père » riposte, toujours très humble M. Bélénus, car il avoue sa principale source d'inspiration, un romancier populaire français (du même type que Michel Zévaco, l'immortel auteur des aventures du chevalier de Pardaillan, que l'on peut vénérer comme je le fais comme auteur d'aventures palpitantes), mais qu'on peut difficilement considérer comme « un historien du XIX ème siècle ».

Le cinéaste sourit jaune, mais garde de Conrart le silence prudent.

« Pour avoir écrit cela s'exclame l'animateur, ce romancier ne pouvait être qu'un romancier de gare!"

Bélénus, homme poli, laisse passer. Mais c'est lui qui a raison.

Voici ce que dit de Solitude l'UNESCO cet oracle des temps modernes : https://fr.unesco.org/womeninafrica/la-mul%C3%A2tresse-solitude/pedagogical-unit/4

Et puisque l'UNESCO, elle-même, renvoie à Auguste Lacour je me suis permis de scanner le passage du tome quatrième de son Histoire de la Guadeloupe où (pages 397 et 98 , que je reproduis ci-dessus en 2 ème photographie) où il évoque la figure de cette dame problématique (mulâtresse Marthe-Rose, dite Toto) qui n'est pas née en Afrique et dont l'épopée présumée tient dans ces lignes écrites par cet historien blanc-créole.

Comme l'animateur semblait tourner la page pour passer à un autre sujet moins glissant, je fermai ma TV pour vaquer à d'autres occupations.

Mais j'ai été heureux de la présence sur l'écran de René Bélénus. Professeur d'hitoire et praticien des disciplines historiques.

Si je ne publie qu'aujourd'hui cette petite critique, c'est que nous approchons du baccalauréat, et que je pense aux jeunes apprentis qui vont se confronter à l'épreuve de philosophie. Imaginons qu'il leur soit demandé de répondre à la question « l'histoire est-elle une science objective » ?

Il serait bon qu'ils aient réfléchi auparavant à l'épistémologie des sciences humaines, à la question complexe de la nature de l'enquête historique, de la synthèse historique, au terme desquelles, même les meilleurs historiens (et les plus … honnêtes!) reconnaissent le caractère en définitive aventureux des jugements absolus et définitifs.

Et je leur propose, à ces jeunes, en cette période de révision, ce propos de Paul Valéry, penseur éminent s'il en est à qui on ne racontait pas facilement « d'histoires » : « L'histoire est le produit le plus dangereux que l'alchimie de l'intellect ait élaboré.

(Le Scrutateur).

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