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Le Scrutateur.

Blog destiné à commenter l'actualité, politique, économique, culturelle, sportive, etc, dans un esprit de critique philosophique, d'esprit chrétien et français.La collaboration des lecteurs est souhaitée, de même que la courtoisie, et l'esprit de tolérance.

La place de l'entreprise dans la nouvelle société guadeloupéenne, par Christian Viviès.

 

La place de l'entreprise dans la nouvelle société guadeloupéenne.

 

Intervention de Christian VIVIES Centre Culturel SONIS - Mercredi 8 juillet 2009.

 

 

Mesdames et Messieurs, bonsoir.

 

 

Avant tout, je souhaite remercier Joseph MOUEZA de m'avoir invité à participer à ce

débat.

M. MOUEZA est quelqu'un que je connais peu. Nous nous sommes croisés quelquefois dans des réunions, y compris récemment, au congrès des Elus de la

Guadeloupe ou nous étions invités l'un et l'autre.

Mais si je le connais peu, c'est quelqu'un que j'apprécie beaucoup car sa réussite

professionnelle est un encouragement pour les jeunes Guadeloupéens qui ont le

désir de s'engager dans l'aventure de l'entreprise.

Lui et d'autres entrepreneurs guadeloupéens font tous les jours la démonstration

que, contrairement au discours à la mode, il n'est pas nécessaire d'être issu de telle

ou telle communauté pour réussir son parcours d'entrepreneur.

Ce qu'il faut, c'est vrai, et il pourra vous le dire mieux que moi, c'est vouloir réussir,

accepter le risque, innover, économiser et surtout avoir du courage et persévérer.

Ceci étant dit, mesdames et messieurs, on m'a demandé d'intervenir sur le thème suivant : « la place de l'entreprise dans la nouvelle société guadeloupéenne ».

 

Si c'était un sujet du bac, je dirais que si le concept de l'entreprise est bien défini, la nouvelle société guadeloupéenne, elle, est encore en devenir ou plus exactement, en réflexion de construction et nul ne peut dire aujourd'hui à quoi cela aboutira ni, à fortiori, quelle sera la place de l'entreprise dans cette nouvelle société non encore définie.

Ce dont on est certain, en tout cas, c'est que plus on ira vers une gouvernance autonome et plus la place de l'entreprise sera grande car moins les capacités financières permettront de maintenir au même niveau un secteur public dont les observateurs objectifs reconnaissent qu'il est déjà hypertrophié, à l'image d'ailleurs de la France hexagonale.

Mais comme on n'est pas dans une épreuve du bac et comme il me faut bien surmonter la difficulté de l'intitulé pour accomplir mon intervention, je vous propose de nous interroger sur les dysfonctionnements de l'entreprise dans la Guadeloupe d'aujourd'hui et d'ouvrir quelques pistes de réflexion sur ces situations.

 

Comme vous le savez, avant, pendant et après la crise, on a parlé et on parle encore :

- De discrimination et de promotion des Guadeloupéens,

- D'égalité des chances pour les entrepreneurs,

- De développement endogène,

- De développement durable et de protection de l'environnement,

- Et de « profitasyon ».

Arrêtons-nous quelques instants sur chacun de ces thèmes pour en souligner à la fois l'importance et la difficulté de les résoudre.

 

D'abord la discrimination et la promotion des Guadeloupéens aux postes à responsabilité dans les entreprises.

 

On signale souvent, et parfois à juste titre, que certains entrepreneurs font appel à

des cadres métropolitains pour occuper les postes à responsabilité supérieure au

sein de leurs entreprises.

Mesdames et messieurs, je peux vous assurer que les entrepreneurs sont conscients

de ce problème. Nous en discutons entre nous et nous cherchons des solutions mais

croyez-moi, le problème n'est pas simple.

Les filières de formation sont fondamentales : les bonnes filières doivent êtres

choisies dès le lycée. La filière noble de l'entreprise, c'est les Grandes Ecoles : HEC,

ESSEC, les Sup de Co.

3 critères président généralement à la sélection :

- Une formation initiale pratique ( pas 1 bac+7 en sociologie ou psychologie)

- Une expérience en Management.

- Et surtout un profil de manager et je vous renvoie au tout début de mon intervention quand je complimentais notre ami Joseph MOUEZA.

 

Le patronat va bouger dans ce sens. Nous en faisons une priorité. Nous irons même dans les lycées pour repérer les talents et tenter de les convaincre de choisir les bonnes filières de formation (je signale que parfois, ce n'est pas le souhait des familles).

 

Deuxième problème : comment aider les jeunes Guadeloupéens qui veulent tenter l'aventure de l'entreprise ?

 

C'est vrai, même si on a les compétences, la formation, la volonté, il faut aussi de l'argent et des conseils. Et les entrepreneurs qui ont déjà réussi peuvent parfois compléter les dispositifs publics existants. Nous y réfléchissons et nous avons la volonté de le faire même si je rappelle que l'homme le plus riche du monde a démarré Microsoft avec 1 000 $.

Ceci pour dire que l'argent est utile mais ne remplace jamais la volonté de travail, le courage, l'économie et la persévérance.

 

Troisième problème : le développement endogène.

 

C'est un joli mot à la mode lui aussi. L'idée est noble : il faut rééquilibrer notre balance des comptes. Mais je vous le dis comme je le pense, les difficultés sont immenses :

- Manque d'espace

- Etroitesse du marché

- Niveau élevé des coûts

- Problèmes de transports

- Problèmes de fiscalité

- Problèmes de formation de maintenance de technologie

- Etc.

Vous le savez, les quelques petites industries de transformations que nous avons ici sont largement subventionnées par la Région, par l'Etat, par l'Europe, et c'est tant mieux car si ces subventions s'arrêtaient, ces petites industries mettraient toutes la clef sous la porte.

 

Je voudrais vous parler aussi de développement durable et d'environnement mais le temps manque et je crois important que nous parlions de la « profitasyon ».

 

La « profitasyon » est mot qui n'existe pas dans le dictionnaire. On peut le comprendre puisque c'est un mot créole dont le succès est très récent. Mais par principe, je me méfie des mots qui n'existent pas dans le dictionnaire car par définition, chacun peut leur donner le sens qui lui convient ce qui ne facilite pas la communication.

Est-ce une maladie génétique ? J'espère que non. Est-ce une entorse à la morale dans le fonctionnement de l'économie ? Mais dans ce cas, qui a le pouvoir de dire ce qui est moral ou non ?

Vendre des cigarettes ou de l'alcool, est-ce moral ? Acheter des voitures qui polluent, est-ce moral ?

A ce stade, j'entends ce que m'auraient dit des contradicteurs : « M. VIVIES, vous faites semblant de ne pas comprendre : vous savez bien que ce que nous condamnons, ce sont les excès de profit réalisés par certains. » Très bien et voyons ce que ça donne.

Un groupe qui s'est constitué patiemment pendant des dizaines d'années en

respectant les lois, qui fait travailler des centaines ou des milliers de salariés, qui

paie sans retard les salaires, les charges et les impôts, qui après tout cela réalise 4%

de son chiffre d'affaire en bénéfice net, qui sur ces 4% distribue 1% à ses actionnaires et

réinvestit 3% dans l'économie, ce qui va générer à nouveau de l'emploi et des

impôts, ce groupe là fait-il acte de « profitasyon » ? Je ne le pense pas.

Mon vendeur de coco que j'ai autorisé le matin à prélever gratuitement des grappes de coco et qui l'après-midi me vend une bouteille 4€ : est-ce qu'il pratique de la « profitasyon » ? Je ne le pense pas car il ne fait de mal à personne, il se débrouille, il travaille et après tout si je ne veux pas payer 4€, rien ne m'empêche de boire l'eau du robinet ou de monter dans l'arbre cueillir mes cocos moi-même.

 

Enfin, j'entends dire depuis quelques jours que des systèmes fonctionnent à la CGSS qui auraient permis à des individus exerçant une profession libérale de détourner, avec des complicités internes, des millions d'euros au détriment des fonds publics que les cotisations des entreprises et des salariés ont alimenté. Est-ce de la « profitasyon » ? Peut-être mais je ne l'entends pas dire. Pourquoi on ne le dit pas ? Je me pose la question.

 

Vous voyez, mesdames et messieurs, que ce qui paraît simple est parfois compliqué. Dans une économie libérale, la concurrence établit les équilibres, sauf, et j'en suis parfaitement d'accord, dans les situations de monopole.

Je crois que c'est là qu'il y a un gisement de « profitasyon » important qu'il faut examiner et traiter car il constitue un handicap très important pour l'économie et le pouvoir d'achat des Guadeloupéens.

 

Voilà, mesdames et messieurs les quelques idées que m'ont inspiré le thème qui m'a été proposé. Je voulais vous les faire partager, sachant naturellement qu'elles peuvent être discutées et contestées et surtout qu'elles n'ont d'autre mérite que d'alimenter la réflexion puisque des instances appropriées et autorisées réfléchissent sans doute à tous ces problèmes et proposeront le moment venu un projet de société aux Guadeloupéens.

Ce projet comportera un mode de gouvernance, une option politique. En tant qu'entrepreneurs, nous ne voulons pas intervenir prématurément dans le débat politique mais le moment venu, nous aurons à rappeler à nos responsables politiques, les valeurs nécessaires au développement de l'entreprise dans toute société, à savoir :

- La liberté d'entreprendre,

- La stabilité politique, fiscale et monétaire,

- La sécurité des biens et des personnes,

  • Et une justice indépendante du pouvoir politique.

     

Je vous remercie de m'avoir écouté.

 

 

Christian Viviès.

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T
 Bien vu, erreur réparéeestce mon experience de vendeur dans un consortium d'entrepreneurs békés qui m'a permis d'eviter les désillusions qui touchent aujourd'hui mes collegues fonctionnaires? je crains que des milliers de jeunes méconnaissent le monde  de l'entreprise; comment donc parler objectivement de productivité, de gestion humaine,de salaires et de dialogue social sans blessures symboliques en rapport avec l'esclavage.  Vaste débat
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C
   Il est très positif que nos entrepreneurs se soucient et oeuvrent pour la promotion des guadeloupéens. Avec pour objectif la réalisation d'actions concrètes, la multiplication des contacts entre le monde de l'entreprise et les domaines de formation, initiale et continue,pourrait faciliter l'intégration des jeunes, issus des lycées ou de l'université, au monde du travail. Ainsi que la promotion de ceux qui seraient entrés, par manque de qualification, au premier degré de l'échelle de compétences.  Des entreprises locales peuvent même être recherchées par des étudiants métropolitainsou européens pour acquérir des savoir-faire dans des domaines qui nous sont propres:dans les bâtiments et travaux publics, les modalités et exigences de la construction parasismique, par exemple. Des partenariats et échanges pourraient alors être envisagés en faveur de nos étudiants?  Précisons toutefois qu'à partir d'un niveau très élevé de compétence, des étudiants trouveront plus aisément une activité correspondant à leurs diplômes à Paris qu'à Montpellier, Bordeaux, Toulouse, Pointe-à-Pitre ou Fort-de-France. Ou même parfois à l'étranger; d'où l'importance deslangues européennes, et de l'anglais particulièrement. Mais alors, ces jeunes ne reviendront peut-être pas du tout travailler "au pays"... L'important n'est-il pas d'abord qu'ils aient "trouvé leur voie"?   D'autres,débutant sur place, parviennent à un niveau tel qu'ils doivent rejoindre l'hexagone s'ils désirent continuer plus loin,pour une promotion dans leur carrière. Un enseignant-chercheur, pour devenir maître de conférence puis professeur dans sa spécialité peut bénéficier d'être accueilli dans une université métropolitaine, si le nombre limité de postes aux Antilles-Guyane ne lui permet pas cet avancement.   Notre statut de département français, en nous conférant l'égalité de droit avec ceux de l'hexagone, nous permet d'exiger, à concurrence de titres et d'ancienneté, que de telles promotions soient respectées. Si nous ne l'étions plus, les autres départements et universités pourraient s'en prévaloir pour fermer des portes, ne plus accepter la "libre circulation" des personnes et favoriser leur ressortissants. Eux aussi ont des problèmes de chomage!Or il est des domaines de haute technicité, de recherche et d'industrie de pointe que nous n'avons pas les moyens de posséder sur place. Allons-nous fermer l'avenir aux jeunes guadeloupéens qui pourraient prétendre à de tels niveaux de compétences?   Une EVIDENCE demeure, dans un monde globalisé, qu'un million de personnes (Guadeloupeet Martinique) vaut plus de poids donc de moyens que quatre cents mille âmes sur une île.Mais que c"est encore moins que les moyens et les possibilitée offertes par une nation de SOIXANTE MILLIONS d'Hommes, à une meilleure réalisation des aspirations de chacun.Prenons en conscience et gardons-le en mémoire, si un jour nous devions voter.                                                                                                                      Chantal Etzol
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