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16 Février 2012
( François Bayrou, à la sortie d'une messe, à Pointe-à-Pitre, il y a quelques années ).
Sans trop croire à sa probabilité, Luc Ferry sur son blog, énonce et commente la possibilité d'une élection de François Bayrou.
Par Luc Ferry Publié le 15/02/2012 à 19:30
Une chose est
désormais certaine: à moins d'un séisme inimaginable, comparable à celui qui mit DSK hors jeu, François Hollande sera présent au second tour. Le PS, ce prétendu «grand cadavre à la renverse», n'a en réalité jamais été
aussi en forme depuis l981. Dès lors, trois scénarios et trois seulement sont envisageables.
D'abord le plan catastrophe: un second tour Le Pen-Hollande. Le candidat
socialiste sera alors élu dans un fauteuil, comme le fut Jacques Chirac en 2002.
Deuxième scénario, de loin le plus probable: un match Sarkozy-Hollande.
Une défaite de l'actuel président n'a rien d'inéluctable, mais elle ne saurait être exclue. Nicolas Sarkozy aura, quoi qu'il arrive, beaucoup à faire pour remonter la pente et rattraper un
retard qui atteint des proportions jamais vues à ce stade pour un président sortant. Il peut rebondir, c'est un combattant hors pair, mais le réalisme oblige à reconnaître qu'un échec est
envisageable - et du reste envisagé par lui-même lorsqu'il a évoqué son «après-l'Élysée».
Subsiste alors un troisième cas de figure, peu probable mais pas tout à fait impossible: un second tour Bayrou-Hollande. C'est bien entendu
l'hypothèse que privilégie le président du MoDem. Il s'appuie sur l'idée qu'à la différence de Marine Le Pen, et même de Nicolas Sarkozy, il pourrait être le meilleur candidat de centre droit
dans un second tour face à Hollande. Après tout, Bayrou défend ce à quoi la droite républicaine tient finalement le plus: un réel souci de désendettement du pays et une adhésion de toujours aux
valeurs de l'Europe, à quoi s'ajoutera un projet de gouvernement d'union nationale qui pourrait plaire aux Français. Dans l'hypothèse, bien sûr, où les mauvais chiffres continueraient de faire
peser un doute sur les chances de Nicolas Sarkozy, Bayrou pense qu'il peut apparaître comme un recours. Il rappelle à juste titre qu'en 2007, il aurait pu l'emporter dans un second tour aussi
bien face à Ségolène Royal que face à Nicolas Sarkozy.
Pour être franc, je ne crois guère à ce scénario. Il n'est pas absurde, bien sûr, mais peu crédible et ce pour une raison simple: Sarkozy est
loin, très loin, d'être aussi affaibli que ne le pense Bayrou. Si le risque existe, en effet, qu'il perde au second tour, il est en revanche quasiment certain qu'il y sera présent.
Quel rôle restera-t-il alors pour le président du MoDem? Il devra changer son fusil d'épaule, car il pourrait bien être, s'il en a le courage et
Hollande l'audace, celui qui évite à la France la pénible épreuve d'un gouvernement socialiste coincé d'entrée de jeu entre une extrême gauche hyperdémagogique et des Verts qui réclament sans
rire la semaine des trente-deux heures (quelle perspicacité!), la décroissance (on y est presque, hélas!) ou l'abandon du droit de veto au Conseil de sécurité de l'ONU (c'est-à-dire l'abaissement de la France sans la moindre contrepartie!). C'est là que gît la réelle menace pour le pays, et il est bien
possible que Bayrou soit le seul à pouvoir nous en préserver.
D'aucuns s'imaginent qu'il finira par rejoindre Sarkozy. Ils se trompent du tout au tout. Quoi qu'il arrive, jamais Bayrou ne rentrera dans le
giron de l'UMP. D'abord parce qu'il est convaincu, à tort ou à raison, que Sarkozy va perdre, et on voit mal dans ces conditions quel intérêt il aurait à faire voter pour lui. Ensuite et
surtout, parce que cela reviendrait à anéantir tous les efforts qu'il a consentis depuis vingt ans. L'image du centriste qui rentre au bercail pour un plat de lentilles après tant d'années de
«résistance» serait dévastatrice, à vrai dire mortelle, et même pour un poste de premier ministre, il ne trahira pas ses convictions. L'homme est irritant pour ses adversaires, parce qu'avec
une acuité sans faille, il met toujours le doigt là où ça fait mal, mais il a une colonne vertébrale, des valeurs, de la constance et un cap.
Si l'on regarde le paysage politique de manière objective, hors esprit partisan, l'intérêt de la France serait de disposer un jour, comme aux
États-Unis, d'un grand parti de centre gauche opposé à un grand parti de centre droit. Le centre seul n'a aucun avenir plausible. Il suffit pour s'en convaincre d'imaginer ce qu'il adviendrait
de l'alternance démocratique si, par un improbable hasard, il parvenait au pouvoir.
Pour la droite comme pour la gauche, il est en revanche vital de maîtriser les extrêmes, qui jouent à côté du damier, et dans ce combat
historique, crucial pour le pays, c'est François Bayrou qui détient peut-être bien la principale clé.
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