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Le Scrutateur.

Blog destiné à commenter l'actualité, politique, économique, culturelle, sportive, etc, dans un esprit de critique philosophique, d'esprit chrétien et français.La collaboration des lecteurs est souhaitée, de même que la courtoisie, et l'esprit de tolérance.

Eeh! La petite Islande relève la tête.

Fin 2008, les Islandais étaient quasiment ruinés par la faillite de leurs banques. Ce samedi,  ils élisent leur président dans un climat de forte reprise économique.  Un redressement  que ce peuple de pêcheurs a réussi au prix d'un effort collectif considérable.

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Une austérité «mesurée», un brin d'inventivité et une coupe impitoyable dans les dépenses publiques. Voilà la recette de Johanna Sigurdardottir, premier ministre islandais (social-démocrate) qui a sorti son pays de la crise, recette qu'elle recommande aujourd'hui à toute l'Europe. Alors que la Grèce entre dans sa cinquième année de récession, l'Islande rebondit: en quasi-faillite fin 2008, elle vient de rembourser un prêt du FMI en avance et prévoit, pour la deuxième année consécutive, une croissance proche de 3 % en 2012. Quant aux 320 000 Islandais, qui ont perdu près d'un tiers de leur pouvoir d'achat, loin de manifester, ils retroussent leurs manches. «Il y a un siècle, nous étions très pauvres, commente Karl Blöndal, rédacteur en chef adjoint du quotidien Morgunbladid. Peuple insulaire, nous avons gardé cet instinct de survie. Comme à l'époque, beaucoup préfèrent ne compter que sur eux-mêmes, sans attendre que l'État leur vienne en aide.»

«La pêche nous sauvera encore»

Quand les trois grandes banques du pays se sont effondrées, entraînant dans leur chute la couronne et l'ensemble de l'économie, Jona Svava était assistante maternelle. «Un à un, mes voisins ont été licenciés et ont récupéré leurs bébés, raconte-t-elle. J'ai donc moi aussi perdu mon job.» S'inscrire au chômage? Jona ouvre de grands yeux: «Je ne me sentais pas le droit de réclamer quoi que ce soit!, s'exclame-t-elle. C'était à moi de me débrouiller.» Elle pense alors à son hobby: le tricot. «La laine, nous en avons à profusion avec tous nos moutons, poursuit-elle. C'est la façon la moins chère de s'habiller, de faire des cadeaux. J'ai ouvert une page Facebook, sur laquelle j'ai vite eu 10 000 amis. J'ai publié un livre, vendu des centaines de pulls et de layettes, organisé des réunions où des femmes venaient se remonter le moral en tricotant ensemble.» Aujourd'hui, cette plantureuse brune est accaparée par son petit quatrième, qui vient d'avoir trois mois. Mais dès la rentrée, elle se remettra à tricoter. «Cette maison, on l'a achetée en 2005 pour 25 millions de couronnes (près de 160 000 euros), avec un prêt de 18 millions, indique-t-elle. Aujourd'hui, on doit rembourser 24 millions, et comme les intérêts sont indexés sur l'inflation, chaque mois ça augmente encore! Sans parler de l'essence et de toutes nos factures…»

Son bébé, Jona, épouse d'un pêcheur, l'a baptisé Aegir, en l'honneur du «Seigneur de la mer». Car c'est en partie grâce à lui si la famille et l'Islande s'en sortent. «Les stocks de poissons n'ont jamais été aussi élevés, les prix non plus, se réjouit Björn Gislasson, ancien capitaine de chalutier devenu député écologiste. La pêche nous sauvera cette fois encore!» Les pêcheurs font aujourd'hui partie des Islandais les mieux payés. Les plus imposés aussi - la tranche supérieure est passée à 45,8 %. «On a relevé les impôts sur le modèle européen, explique le député. Comme cela, nous avons pu donner un coup de pouce aux ménages surendettés, sans sabrer dans notre généreux modèle social.» L'âge de départ à la retraite est resté le même: 67 ans.

Moins de ministres, moins de disputes

Comment réduire ses coûts opérationnels en maintenant la même qualité de soins? Perplexe face à sa dotation diminuée de 23 %, le directeur de Landspitali, le principal hôpital de Reykjavik, a consulté tout le personnel, de la femme de ménage au chirurgien. «On a récolté 3 400 propositions d'économies!, raconte Maria Heimisdottir, la directrice financière. En fusionnant des services, en misant sur la chirurgie ambulatoire, en supprimant les heures supplémentaires, en optimisant la gestion des stocks, nous avons atteint notre objectif, avec très peu de licenciements. Le simple fait de coller le prix sur chaque objet fait réfléchir: ai-je besoin de tel pansement spécifique, se demande l'infirmière, ou puis-je me contenter d'un basique?»

Le gouvernement a été le premier à donner l'exemple. De douze en 2009, les ministres sont passés à dix, et ne seront plus que huit en septembre. «Leur salaire, comme celui des députés et des hauts fonctionnaires, a été réduit, indique Björn Gislasson. On a tout simplifié. En fait, on s'aperçoit que l'une des raisons de la mauvaise gestion du pays était le nombre de ministres avant la crise: à 16, ils s'écharpaient sur leurs domaines respectifs!» Les grands travaux, entièrement stoppés pendant deux ans, reprennent doucement. Le chômage est en baisse, à 5,9 %. «Il y a pas mal de signes de reprise, constate Gudny Einarsdottir, DRH. Les gens s'achètent des appartements, recommencent les virées shopping à Boston. Et quand on voit que dans mon quartier le problème principal est la fermeture de la piscine pour rénovation…»

Directeur au ministère de l'Économie, Björn Gudmunsson admet que «l'on s'en sort assez bien et vite. On devrait arriver à l'équilibre en 2014, dit-il. Mais tout le monde ne peut pas laisser ses banques faire faillite ni dévaluer sa monnaie!» Tout le monde peut en tout cas prendre des mesures courageuses, laisse-t-on entendre à Reykjavik. Ministre des Affaires étrangères, Össur Skarphedinsson conseille aux Européens de faire face à leurs difficultés «simplement, comme ici on affronte une tempête de neige: on ferme sa fermeture Éclair jusqu'en haut, on met sa capuche et… on y va!, lance-t-il. À la fin, on sait que reviendra le calme et le soleil.»

Une présidente «normale»?

Malgré «l'humeur dépressive» de Bruxelles, poursuit le ministre, Reykjavik «met la vapeur à fond» pour avancer dans ses discussions avec l'UE. Un an après le début des négociations d'adhésion, l'Islande vient d'entamer 3 nouveaux chapitres. Sur les 18 ouverts (il y en a au total 35), 10 sont déjà bouclés. Mais les Islandais ne sont pas convaincus du bien-fondé de l'adhésion à une Europe en crise: ils seraient aujourd'hui 54 % à la refuser. D'autant que seront bientôt abordées «les questions qui fâchent», selon Össur Skarphedinsson, notamment celle de la pêche. Il faut encore résoudre le contentieux de la banque Icesave, dont l'effondrement avait ruiné des centaines de milliers d'épargnants britanniques et néerlandais. Or, l'UE a annoncé son soutien au recours que préparent Londres et La Haye, en septembre, devant la cour de justice de l'AELE. Une décision que les Islandais ont reçue comme «une serpillière mouillée en plein visage», selon l'expression imagée du ministre de l'Intérieur, Ögmundur Jonasson.

Alors que la situation économique de l'Islande s'éclaircit enfin, ne serait-ce pas l'occasion, lors de la présidentielle de ce samedi, de «prendre un nouveau départ», avec une présidente «normale»? Avec ses 37 ans, sa famille recomposée, sa maison achetée à crédit et son nouveau-né dans les bras, Thora Arnorsdottir dit «connaître les difficultés de la plupart des familles». Sans doute pour mieux marquer le contraste avec son adversaire, le chef de l'État sortant, que cette jolie journaliste blonde est la seule à pouvoir empêcher d'entamer un cinquième mandat. Bientôt septuagénaire, Olafur Ragnar Grimsson, marié à une riche héritière israélienne, a commencé sa carrière politique à gauche, puis évolué vers la droite antieuropéenne. «Lui qui prenait des jets privés avec les banquiers avant la crise, rappelle Karl Blöndal, a vu dans l'affaire Icesave une occasion de redorer son blason: par deux fois, il a utilisé son droit de veto contre les propositions élaborées par le gouvernement pour rembourser les Britanniques et les Néerlandais». Outre cette prérogative de s'opposer à certaines lois, les fonctions de président sont en Islande largement représentatives.

En face, Thora - en Islande tout le monde s'appelle par son prénom - se dit «apolitique», même si elle vient d'une famille de politiciens de gauche. «Je veux représenter l'ensemble du peuple islandais, clame-t-elle. À propos de l'UE, je suis favorable à un référendum, mais je ne donnerai pas mon opinion.» Aucune conviction!, conclut le camp d'Olafur. Aucune expérience internationale non plus. «Mais si!, proteste la journaliste. J'ai interviewé de nombreux leaders mondiaux. Comme Eva Joly…»

Forte de sa notoriété de présentatrice à la télévision, Thora a d'abord connu une magnifique trajectoire dans les sondages. Mais le vieux président, qui se pose en protecteur de la nation, a largement repris l'avantage. Qu'importe, Thora y croit encore: «Les gens ont un extrême besoin de changement!, insiste-t-elle, affalée dans son canapé, mordant dans un bout de pain tout en allaitant sa petite fille. L'image de l'Islande s'est tellement dégradée ces dernières années…» Ici, personne n'a osé s'exclamer: «Mais qui va garder les enfants?» Ils sont pourtant six… Svavar Halldorsson était déjà père de trois adolescentes avant d'avoir trois enfants avec Thora. Lui aussi journaliste télé, il s'est déjà mis en disponibilité et se dit ravi de jouer les pères au foyer. «Je sais changer les couches!, crie-t-il depuis la cuisine. Je sais réparer la voiture, je mitonne de bons petits plats et puis… Ah oui! Je vais arrêter de tweeter.»

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Par Stéphane Kovacs

 

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C
<br /> L'Islande a su prendre les bonnes décisions...sauf une : Cela aide de ne pas rembourser ses dettes en ruinant les petits porteurs Anglais et Hollandais et aprés demander de rentrer dans une<br /> Europe que l'on a longtemps snobé quand tout allait bien, du moins en apparence.<br /> <br /> <br /> Cela dit pour les avoir rencontrés dans leur beau pays,c'est un peuple courageux et travailleur dans un pays où les éléments ne sont pas toujours favorables.Les volcans destructeurs<br /> permettent aussi de faire pousser,sous serre...des bananes ! C'est aussi un pays où il n'y a pas de vision négative du travail et où l'on peut voir un médecin ou un fonctionnaire aider les<br /> éleveurs à rentrer leurs moutons avant l'hiver,parceque l'éventail des salaires est plus resseré que chez nous et qu'il n'y a pas d'emploi dévalorisant ni, du coup, d'immigration débridée.<br />
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D
<br /> http://www.youtube.com/watch?v=yy5H52NYIoU&feature=related<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Olivier Delamarche le 3 juillet.<br />
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