29 Décembre 2013
( Je suis heureux de recevoir d'un acteur local de la production économique, cette analyse circonstanciée de la crise en cours dans le domaine de la distribution de carburants. LS )
un commentaire vient d'être posté par Frank Maynadié sur l'article Points de vue sur le conflit entre le gouvernement, la SARA, et les gérants de stations services au sujet du prix de l'essence., sur votre blog Le Scrutateur.
Extrait du commentaire:
Le décret de 2010 est clair, il n'a pas touché les marges existantes, il a forcé la SARA à dévoilé le chiffrage de ses coûts et donc à généré une dure négociation, entre la SARA et l'état,
pour aboutir au décret actuel.
De tout temps, nos politiques locaux ont tempétés contre les bénéfices "énormes" que les compagnies pétrolières font "sur le dos des Guadeloupéens" en profitant des prix réglementés.
Affirmation non prouvée.
A la faveur des élections de 2012, Mr LUREL à émis une loi sur la vie chère qui lui a fourni les armes nécessaires pour mettre à genoux les différents acteurs de la filière
carburant.
Les premiers visés car les plus inaccessibles jusqu'alors, les compagnies pétrolières en tant qu'actionnaires de la SARA et
en tant que distributeurs grossistes.
Le décret en prévision vise donc à réduire au maximum les marges des compagnies.
1er argument: les compagnies sont actionnaires de la SARA et grossistes. Elles touchent donc deux fois. Sans oublier qu'elles facturent un loyer aux stations que celles-ci payent
avec une partie de leur marge fixée par le décret ! Pour nos politiques, les compagnies prélèvent donc à trois niveaux sur le système que l'Etat met en place pour fair payer les
consommateurs !!!
Attention, depuis quelques années, une compagnie locale CAP existe et n'est pas actionnaire de la SARA. De même GPC, même si il n'existe qu'une seule station à cette enseigne. Donc pour ces
2 compagnies locales les seuls bénéfices possibles, sont la marge du grossiste et les loyers. Si donc MEDETOM influe sur ces deux postes, la question de leur survie sera posée.
2ème argument: l'approvisionnement de la SARA. Là encore est dénoncée l'opacité du système. Les seuls compagnies pétrolières fournisseurs de la SARA sont les actionnaires de la
SARA. ( bénéfices supplémentaires pour celles-ci)
Le décret de 2010 à institué une clarté de la règle qui en fait cache la possibilité pour les acteurs en amont de continuer à bien gagner de l'argent. Le prix d'achat des carburants est fixé
en fonction de l'indice du BRENT et du Dollar combiné. Or il apparaît que l'autre indice le plus usité, celui de New-York, est constamment moins élevé. Et les fournisseurs de la SARA ont
la
possibilité de fournir ce client, c'est à dire eux-mêmes, à partir de n'importe quelle origine et au prix qu'ils contribuent à fixer.
Bref, les compagnies gagnent de l'argent. Pas toutes au même niveau. Les compagnies locales sont loin de s'enrichir. De plus, vous en parlez dans votre article, la SARA à décidé de ne plus
gérer les stocks stratégiques. De quoi s'agit-il ?
Toute compagnie pétrolière doit avoir à sa disposition des stocks dit "stratégiques"qui correspondent à la quantité vendue en un mois. Jusqu'à ce jour, la SARA, dont les actionnaires étaient
la
totalité des compagnies présentes en Guadeloupe, gérait pour elles ces stocks stratégiques. Depuis décembre 2013, la SARA à décidé de ne plus rendre ce service. Or deux des compagnies
actuelles sont Guadeloupéennes et non actionnaires de la SARA. Conséquences: la SARA va vendre ses stocks stratégiques actuels; les bénéfices qu'elle va en tirer vont remonter aux compagnies
actionnaires; les compagnies vont utiliser ces bénéfices exceptionnels pour reconstituer des stocks stratégiques à leur nom, dans les mêmes dépots à la SARA. Sauf pour les 2 autres
compagnies, qui elles doivent trouver de l'argent frais pour constituer leur propres stocks stratégiques et négocier avec la SARA le stockage de ceux-ci dans ses réservoirs.
La question de base qui se pose aujourd'hui est la question de la raison d'être des acteurs de la filière.
Tous les acteurs sont des agents économiques. Et tout agent économique, pour survivre doit générer du profit. Dans un système règlementé, c'est le consommateur final qui alimente les
acteurs concernés.
Les acteurs doivent-ils continuer à gagner de l'argent ? Le consommateur doit-il continuer à alimenter les acteurs économiques qui font marcher le système, mais également les
collectivités qui vivent des taxes prélevées sur chaque litre vendu ?
Le ministre met en avant la volonté du gouvernement de clarifier les choses pour que le consommateur paye moins cher, parcequ'on aura forcé à la baisse des marges.
Mais qui pourra imposer à quelque acteur économique que se soit, de travailler s'il ne gagne pas assez d'argent ? Le gouvernement va t-il dire combien chaque acteur devra gagner
pour avoir l'honneur de travailler ? Serons-nous demain dans un marché du carburant où l'Etat obligera des sociétés privées à travailler selon son bon vouloir ?
La menace qui pèse sur les gérants est plus que sérieuse. Si demain les compagnies n'ont plus assez de marge, telle qu'elles l'entendent et non tel que l'entend notre ministre, elles iront la
chercher là ou elle se trouve. En premier lieu chez les gérants. 0.12 centimes qui servent à faire vivre les gens qui travaillent dans les stations. Du gérant aux salariés.
Donc on remplace les gérants "libres" par de simples salariés et quand en réaction l'autorité baissera les marges des stations, elles se sépareront des salariés, comme en Europe et
généraliseront les pompes et les stations automatiques. Elles diminueront le nombre de stations sur le territoire et adopteront ici les méthodes de là-bas.
Quand on sait que l'Europe s'est un jour rendu compte que les compagnies s'entendaient sur les prix à pratiquer sur le continent, on imagine le pouvoir que pourra avoir notre préfet ou
notre Président de région pour dicter sa loi à des compagnies dont les sièges ne seront plus chez nous et qui n'ayant plus de marges confortables à négocier, feront ce qu'elles voudront ou
s'en iront.
Qui aujourd'hui pourra imposer à la SARA, ne serait-ce que d'exister ? Qui pourra forcer des compagnies même Françaises à travailler chez nous, pour des clopinettes ?
Personne.
Certe le prix du carburant actuel dans les DOM est élevé. Certes il existe des marges de manoeuvre sur l'approvisionnement de la SARA. Mais les seules actions sur les acteurs économiques
sont dangereuses de conséquences irréversibles sur le système. Voulons-nous changer de système ?
Par contre il est aussi possible de travailler sur la baisse des taxes, l'autre poste le plus important du prix du carburant. Mais nous savons que cette mane versée par les consommateurs, sert
à alimenter les communes. Et nous savons que par le côté plétorique des emplois générés par le clientélisme, elles ne peuvent pas s'en sortir sans la taxe sur le carburant. Et là bien sûr,
le gouvernement n'a pas fait de loi pour imposer aux collectivités quelles qu'elles soient de financer leur dépenses avec leur propres ressources.
Les gérants se battent donc, parce que les compagnies leur ont bien expliquées que si on baissait leur marge, elles allaient changer le système et que dans le futur système, ils n'auront
pas leur place. Et les salariés des stations, qui pour des raisons politiques et syndicales, ne veulent pas se mêler de ce sujet, feraient bien de réfléchir aux conséquences. Car
dans les temps
de crise, les premiers à souffrir, sont les plus petits.
Frank Maynadié
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