7 Juin 2010
Suite d'un mauvais gag.
C'est l'histoire d'un (mauvais) gag, et qui a mal
tourné.
Fillon "réaffirme son soutien" et "sa confiance" à Hortefeux, titre... nouvelobs.com. Quelle histoire !
C'est l'histoire d'une plaisanterie. Sotte, lourde, grossière, plouque. En un mot la plaisanterie grotesque par excellence.
Un peu comme l'humour des humoristes d'aujourd'hui (la liste est très longue - hélas ! -, de ces "zumoristes" qui sont à l'humour ce que les fumistes sont à la fumée),
ces présumés comiques que l'on nous sert et ressert sans modération car tout est devenu, en France, affaire de réseaux ; y compris, à la télévision, les chaînes du "service
public". S'agissant de nos élus-dirigeants, tout le monde sait qu'on n'attend pas plus d'esprit de finesse que d'esprit de géométrie chez "nos" politiques, et il y a longtemps que nous
avons fait notre deuil de la subtilité, tant dans l'analyse que dans l'action. Nous, oui. Mais pas la police de la pensée. Et encore moins l'un de ses bras séculiers, semble-t-il : la
police des plaisanteries, qui veille et surveille le moindre propos dont elle pourrait faire son miel. Rien que du mécanique, là-dedans. Et du bien vivant. Or c'est précisément dans le
mécanique plaqué sur le vivant que se situe, comme dirait un certain Henri B., le ressort comique de la situation. Du mécanique, en effet, il y en a depuis le commencement de cette
affaire. Et même avant la ridicule saillie de M. Hortefeux (qui se voulait amical et chaleureux là où le tribunal a retenu l'injure raciste, c'est dire si la diversité est au
rendez-vous, ne serait-ce que dans la relation entre l'intention et l'interprétation). Le mécanique réside dans tous ces mécanismes qui permettent de faire d'une braise, un gigantesque
incendie qui devient, pour le baudet de la fable, un véritable bûcher.
Sur le plan mécanique, il y a le doigt, puis le bras engagés dans l'engrenage de la police de la pensée par ceux-là même,
qui, aujourd'hui, devant l'absurdité de la situation, et à défaut d'exprimer leur véritable pensée - tant la police de la pensée est menaçante -, expriment leur... solidarité. Cela
ne veut pas dire grand-chose. Cela veut d'autant moins dire qu'ils ont déjà fait preuve de solidarité dans la mise en place de cette police de la pensée ( sur la police de
la pensée, lire 1984 de Georges Orwell où tout est dit et analysé, avec la plus grande minutie et clairvoyance° dont ils ont renforcé le dispositif totalitaire et diabolique mis en
place par François le Fourbe : par... solidarité, ils ont donné la main à ceux qui gèrent l'attribut et l'attribution. C'est ainsi que le Président Sarkozy a renforcé le dispositif, et
que son plus fidèle lieutenant s'y est englué après s'être lamentablement débattu dans les mailles du filet qu'il a contribué à se jeter dessus en croyant s'enduire
du baume de l'invulnérabilité. Il faut dire que les uns et les autres pensaient pouvoir récupérer la machine infernale pour leur usage exclusif. C'est un peu puéril, sans
doute, mais ne sommes-nous pas tous, à un moment ou à un autre, de grands enfants ?
Pour en revenir à l'escalade du grotesque dans notre affaire, il y a "la petite phrase" elle-même : sotte, sans
intérêt, lourdingue, et, est-il utile de le préciser, même pas drôle. Et puis voilà que les paroles travesties par des gueux pour exciter des sots ont parfaitement rempli leur
mission : une plaisanterie de débile mental (ce n'est pas l'homme qui est ici visé, mais le propos) est devenue une affaire d'État. De fil en aiguille, le premier flic de France - le
Fouché du moment - s'est trouvé soumis à l'interrogatoire le plus insidieux qui soit, devant une opinion publique qui ne demande rien et devant laquelle l'intéressé s'est entortillé
dans des explications encore plus lamentables que le propos initial. Tout ça, parce que les politiques qui se croient toujours à l'abri du sort commun ont tout fait pour encourager le
poids de la police de la pensée dans les allées et venues de l'esprit. Et donc, au lieu d'envoyer promener les mouches, voilà notre Ministre de l'Intérieur (et plus fidèle lieutenant du
premier personnage de France qui plus est) pris comme un enfant de douze ans qui aurait recours au déni avec autant d'habileté qu'un enfant de six ans. Voilà qui nous éclaire un peu sur
le genre de tribunal et sur le genre de procès qu'eut à subir Louis XVI. L'enjeu, il est vrai est différent : les accusateurs publics ont déjà officiellement le pouvoir, alors
que les premiers républicains ont dû tuer le roi pour "officialiser" leur pouvoir et pour auréoler de la vertu républicaine le parjure de 1792. Et puis le présent registre est
celui de la futilité, et, pour le moment qu'il n'y a pas eu mort d'homme, M. Hortefeux n'étant pas M. Salingro. Mais la cause est tout aussi sournoise.
Ceux-là même qui, aujourd'hui, multiplient les témoignages de moralité (le feraient-ils pour qui que ce soit d'autre pris
dans le même pétrin ?) ont implicitement - quand ce n'est pas explicitement - encouragé l'esprit de cabinet qui anime aujourd'hui la vie publique. Le Comité de salut public est
ressuscité, mais il est aujourd'hui exercé dans une pluralité convergente par toute sorte d'officines qui se sont attelées à la cause incertaine qu'est "l'anti-racisme" certifié, et
surtout... confisqué. S'il y a dans la certification un premier élément de suspicion possible, tous les autres sont dans cette confiscation qui ne fait de doute pour personne, mais qui
a pris aujourd'hui un tel poids médiatique et "meutique", si l'on peut dire (ce qui sous entend la possibilité de rameuter les troupes très facilement), qu'il faudrait pour endiguer le
phénomène un courage et un sens de la vérité que nos élus-dirigeants n'ont guère, se contentant de penser en cachette que la France est un pays ingouvernable et que les temps sont
tellement troubles qu'il ne faut surtout pas agiter quoi que ce soit autre que ce qui s'agite déjà. Faute de pouvoir ramener les assaillants à la raison, ils soutiennent le copain sans
pour autant désamorcer la bombe : ils veulent simplement, sur leur bonne parole, soustraire le copain au piège qu'ils ont pourtant posé ou laisser poser sans mot dire. Mais
quelle idée de croire qu'en installant la confusion des esprits, à moins d'être M. Mitterrand (François) en personne, ce qui n'est pas donné à tout le monde, on pourra en tirer profit
?
On observera que les maîtres de ballet considèrent qu'il y a eu injure. Or la personne avec qui a eu lieu l'échange
"délictueux" ne se considère pas comme insultée. Dans l'insulte, il y a l'intention, il y a le ton.... Là, comme nous étions loin de l'insulte, dans cet échange qui se voulait... de
connivence. Il n'y avait bien évidemment aucune volonté de blesser, même si la maladresse de l'esprit (cf. L'Ours et l'amateur de jardins de ce cher Jean de L. F.) peut
faire des dégâts. Nulle colère, nulle froisserie chez la victime putative, et ,ne se sentant victime de rien, pas la moindre intention chez cette personne de chercher le
moindre pou sur le crâne dégarni de ce bon M. Hortefeux qui a eu la gentillesse de venir faire un brin de causette. C'est alors que des tiers - assez spécialisés - se sont
faits les souteneurs de la cause et se sont mis en position de ramasser les dommages et intérêts que le tribunal correctionnel n'aurait su se priver de distribuer. Or, entre nous, si
dommage il y a eu, ce fut plutôt au péjudice de M. Hortefeux, mais passons. Donc, en partant d'un propos adressé à Monsieur Y par Monsieur X, Monsieur Z peut se mêler de la conversation
et se porter partie civile alors que Monsieur Y est directement concerné par le propos de Monsieur X et n'y trouve rien à redire. Veut-on mettre Monsieur Y sous tutelle ou cherche-t-on
à mettre Monsieur X en coupe réglée ? Un peu des deux, certainement. Et personne, parmi les consorts Mitterrand, Chirac ou Sarkozy ne peut se prétendre étranger à la manoeuvre. Quant à
Monsieur Z, il lui suffit de se placer au bord du chemin pour convertir l'inquisition en espèces sonnantes chaque fois qu'un trébuchant passe par là. Un trébuchant qu'il veut faire
trébucher, évidemment. Car les postulants à la trébuche sont soigneusement sélectionnés par le jury... d'honneur et de dignité.
Ce pauvre M. Hortefeux, là-dedans est l'arroseur arrosé, voire le dindon de la farce. Et de quelle farce ! Pour ce qui est
des faits, que dire de plus, sinon que la sanction a été immédiate : elle est tombée tout de suite, lorsque par la magie multiplicatrice d'Internet M. Hortefeux a dû voir
et revoir les images du "délit", et ré-entendre à l'infini ses propos dont la sottise ne lui a certainement pas échappé à la première diffusion ? Quelle punition que d'être confronté à
son propre ridicule et d'y être implacablement contraint par la malignité faisant croisade sous les couleurs de l'angélisme !
Et puis, la justice est intervenue. Pas aveugle du tout, il faut croire. Alors elle retint l'injure raciste, là où aucun
dictionnaire n'aurait reconnu la définition de l'injure : tout au plus une considération oiseuse. Cependant, on ne commente pas une décision de justice. Du reste, on ne pourra bientôt
plus rien commenter du tout, en France. Les associations auront gagné. Et Mitterrand, des Enfers où certains l'imaginent se prélassant au milieu de 10.000 vierges, n'en revient toujours
pas d'avoir possédé son monde à ce point, en posant partout des bombes à retardement que, de son vivant, il était le seul à pouvoir désamorcer en qualité de "deus ex
machina".
Pendant ce temps-là, des bandes "ethniques" se livrent tous les jours à des assauts d'injures "ethniques" et à toutes sortes
de menaces physiques sur des passagers isolés dans les transports en commun, où sur de simples passants qui ont la malchance de les rencontrer. Bien entendu
l'anti-racisme comme la justice n'en a jamais entendu parler. Et l'on peut avoir des doutes. Beaucoup de doutes, sur beaucoup de sujets qui ont trait à la vie publique, à nos
élus-dirigeants et à tous ceux qui exercent les différents pouvoirs constitutionnels ou associationnels en France. Une image familière vient alors à l'esprit : celle de trois singes,
dont l'un se bouche les yeux, l'autre les oreilles, et le troisième met la main devant sa bouche. Pour être tranquille, peut-être ferions-nous bien d'en faire autant. Au diable la
vérité ! Au diable la conscience ! Au diable la justice, les injustices et les victimes ! Vive les slogans et, surtout, vive la...pwofitasyon, non ?
André Derviche.
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