Il est faux de dire que le Parti Socialiste a échoué partout. Il a réussi à imposer comme candidat le plus improbable de tous les candidats, celui que ses coreligionnaires traitaient à longueur de petites phrases assassines d'incompétent, lâche, mou, mauvais en tout. Même son ancienne maîtresse le disait incapable de réussir quoi que ce soit. Pourtant, c'est lui que les militants ont élu, sur un programme dont tout le monde savait qu'il était périmé par l'évolution de la France, la droitisation galopante des peuples de l'Europe revenus du socialisme et la violence de la crise économique et financière mondiale. Les journalistes enamourés de la gauche le savaient aussi, eux qui tiraient à vue depuis cinq ans sur le chef de l'Etat à la moindre de ses initiatives pour moderniser et réformer notre Etat boursouflé de dette et de fonction publique. Ils n'ont rien dit. Peut-être n'ont-ils rien compris.
"Pour le programme (le nouveau), il faut prendre son temps" expliquait Manuel Valls. Le temps, ils l'ont eu depuis 2002 et leur mémorable gamelle électorale. Mais depuis, ils ont été incapables de se remettre en question, pas même capables de passer au crible de l'analyse marxiste leur propre gestion et les nouveaux concepts idéologiques qu'ils prêchent à leur "peuple de gauche", les bobos de la génération bourgeoise mitterrandienne.
Il faut les comprendre, autant leur demander de se suicider tout de suite. S'ils refusent de faire l'analyse que leurs amis socialistes allemands du SPD ont su faire dès 1959, c'est qu'ils y ont un intérêt majeur : cela pourrait détruire le réseau de financement occulte mis en place patiemment depuis soixante ans.
Il couvre toute la France, comme une pieuvre. Cet inquiétant système de corruption s'appuie essentiellement sur le trucage des marchés publics. Gérard Dalongeville, ce bon petit militant fidèle et consciencieux, a décrit minutieusement le fonctionnement de la pompe à fric socialiste dans sa ville d'Hénin-Beaumont, pour se venger d'avoir été sacrifié par le parrain local menacé par une enquête de justice, parrain pour qui il a fait huit mois de prison. Je n'ai pas terminé la lecture de cet ouvrage édifiant, aussi je vous garde le décorticage du système de financement occulte du PS pour un prochain article.
Dalongeville n'extrapole pas au-delà des départements du Nord et du Pas-de-Calais. Cependant, la liste des dirigeants du PS impliqués et mis en examen dans des affaires de "trafic d'influence" ou "non respect du code des marchés publics" en dit long sur les ramifications de la mafia rose (on en trouve une liste non exhaustive sur internet). Le président du groupe socialiste à l'Assemblée nationale, Jean Marc Ayrault, n'a-t-il pas été lui même mis en examen en 1991 pour ce motif ? Dans les milieux d'affaires de sa bonne ville de Nantes, de méchantes langues susurrent, autour d'une bouteille de whisky, que ça continue et même que des enveloppes gonflées de gros billets, parfois des attachés-cases bien lourds circuleraient encore. Mais il faut le prouver.
Dalongeville explique fort bien pourquoi c'est difficile.
Il raconte comment, à Hénin-Beaumont, c'est la loge locale des frères du Grand Orient de France qui sert de bureau d'affaires. On en discute pendant les "agapes" qui suivent la tenue où l'on a religieusement écouté le Frère Untel plancher sur l'intérêt, pour l'élévation morale de l'humanité, de l'élevage du rastaquouère à crête mordorée en Alaska septentrional.
"C'est pratique", dit Dalongeville, les Frères recrutent large : artisans, agriculteurs, hommes d'affaires, maires, donneurs d'ordres, chefs d'entreprises, élus municipaux, le financier du PS a tout le monde sous la main pour organiser le prochain appel d'offres sur marché public. On sait qui aura le marché et en échange de quelle enveloppe. Mais dans les "tenues" il y a aussi des frères policiers, magistrats, avocats, notaires et tout ce petit monde papote, alors le bon vin aidant, le parrain ne tarde pas à savoir qui risque d'être inquiété par la justice, comment évolue telle affaire en cours. Il n'attend donc pas la perquisition à venir dans son coffre situé à la mairie sous le buste de Jean Jaurès. Dès l'alerte donnée, son directeur de cabinet prend un avion-taxi, payé par la commune, vers le plus proche paradis fiscal pour y blanchir en vitesse l'argent taxé à leur insu aux contribuables qui paieront sans le savoir les conséquences des marchés truqués, des surfacturations, des frais de voyages et de bouche, ou l'achat d'un appartement sur la côte pour le parrain.
Le parrain est généreux, il trouve volontiers des emplois fictifs aux femmes aux frères et aux enfants des "amis". Les frères maçons le savent et aucun n'aurait l'idée de proposer de payer son écot. D'ailleurs, à Hénin-Beaumont, la loge du GOF n'est-elle pas hébergée gratuitement dans un bâtiment municipal et n'est-ce pas le traiteur municipal qui sert les "agapes" et envoie la facture à la mairie ?
Cela dit, Dalongeville ayant écrit son livre, on attend avec impatience celui que Robert Navarro pourrait bientôt écrire à son tour sur le financement du PS en Languedoc-Roussillon si le PS ne fait pas le nécessaire pour le tirer d'affaire. Navarro, c'est la pointure au-dessus de Dalongeville, puisque lui était le secrétaire départemental du PS pour l'Hérault (Montpellier), poste dont il a démissionné pour préparer sa défense. Quatre personnes de son entourage (sa femme, ses deux attachés parlementaires et le maire d'Avène) ont été placées en garde à vue fin janvier pour une bête mais louche histoire de 130 000 € de frais de bouche et de transport. Mais ce qu'espèrent les enquêteurs, c'est trouver à l'occasion de cette petite enquête des délits bien plus graves sur lesquels ils ont de forts soupçons. Pour être clair, un système de corruption organisée à l'échelle de la région, semblable à celui qu'Arnaud de Montebourg a dénoncé dans le Pas-de-Calais (est-ce la raison du départ subit de Jack Lang de Boulogne-sur-mer pour l'Est ?).
Sans oublier que la "famille" Guérini est toujours en difficulté judiciaire dans les Bouches-du-Rhône pour faits de prise illégale d'intérêts, trafic d'influence et association de malfaiteurs.
Sans oublier non plus qu'un autre candidat à la primaire socialiste, Jean-Michel Baylet, sénateur, président du Conseil Général du Tarn-et-Garonne (Midi-Pyrénées), déjà condamné en 2007 pour abus de biens sociaux, remis en examen en 2009, a été à nouveau condamné à de la prison avec sursis et une forte amende pour favoritisme dans l'attribution de marché public, abus de biens sociaux, faux et usage de faux. Lui ne parlera pas, le PS le soutient et il est ministrable si le candidat gagne le 6 mai.
Le candidat socialiste va prétendre qu'il ignorait tout cela et s'indignera qu'on puisse les soupçonner, lui et le parti.
Le PS est passé expert dans l'art d'envoyer les sous-fifres en prison pour épargner les dirigeants nationaux. Mais c'est le Premier secrétaire du parti lui-même qui félicita rue de Solferino, en 2008, Fernand Darchicourt, député du Nord, circonscription d'Hénin-Beaumont, et grand argentier du PS pour son "travail". De plus, le candidat socialiste est un ami proche de Navarro qui jure "J'en veux terriblement à la direction nationale de mon parti… Je ferai campagne à fond pour lui (François), mais je ne veux pas qu'on se serve de cette affaire pour me salir" (Le Figaro du 24 janvier).
Comprenez : "Vous êtes à la tête du système, arrangez-vous pour me tirer d'affaire, je la ferme et j'aide François à gagner". "Rose mafia" vous dit-on.
Cerise sur le gâteau, hier soir, à C dans l'air, on a appris que M. de Rothschild, patron et propriétaire du très vertueux Libération qui offre des pages entières de pub gratuite au candidat socialiste, est exilé fiscal en Suisse !
Maurice D.