23 Mai 2012
J'avais jusqu'à hier soir ( 22 mai ), parmi quelques autres, une lacune : je n'avais pas vu le film Entre les murs de Laurent Cantet, sorti en 2008. Cette lacune est désormais comblée puisque j'ai pu, ce 22 mai sur France IV voir le film, et en rester prostré ( pendant une ou deux minutes. Au-delà de deux minutes, il devient évident que vous avez perdu toute ardeur combative, et que vous êtes bon pour rejoindre la cohorte des pleureurs ou des pleureuses, dont « nos enfants » n'ont nul besoin en ces temps de décadence, et de démission généralisée ).
On ne raconte pas un tel film, qui se déroule, en France, dans un collège de banlieue difficile. Comment raconter la vie quotidienne d'une classe de quatrième, tout au long d'une année? Surtout quand nulle jeune fille ne tombe amoureuse et...enceinte, ni de l'un de ses camarades, ni de son professeur de français, qui est « l'adulte »que nous voyons le plus souvent dans, non point cette tragédie ( il ne faut rien exagérer ), mais dans ce drame, ce psychodrame, d'autant plus pathétique que l'on nous dit qu'il donne une vision fort exacte de la vie scolaire dans moult écoles de notre beau pays, gagnées aux plus « belles » divagations "des lumières" dont nous sommes, parait-il, les héritiers fidèles ( !!! ).
Un professeur, jeune ( la quarantaine ) a pour tâche d'enseigner la langue de Voltaire à un trentaine de gamines et gamins de 14 ans en moyenne, qui offrent à notre regard étonné un riche kaléidoscope, où les cultures, et les teints, devraient offrir une image enthousiasmante de la diversité créatrice qui doit, nous dit-on, succéder à la morne uniformité des anciens jours.
Le professeur ( François Bégeaudeau ) est compétent et enthousiaste. Parmi les élèves un ou deux gamins intelligents, peut-être même doués. Un petit chinois travailleur, au regard plein de malice polie. Un grand leucoderme, de souche, qui a de l'ambition, et dont le regard étonné au spectacle quotidien de la horde, laisse percer un soupçon de mélancolie.
Les autres, que l'éducation nationale d'il y a cinquante ans, et plus, aurait entrepris de « former »et d'assimiler à une civilisation française qui existait alors, vont et viennent au gré de leurs humeurs du moment inspirées des relents d'une société médiatique, pourrie, et pourrissante, vont et viennent, baguenaudent entre deux clips, deux plaisanteries grasses et vulgaires, dans l'ignorance la plus abyssale du vocabulaire élémentaire, dans le mépris proclamé des bases les plus fondamentales de la culture.
Jeunes d'origines arabes, maliennes, de partout et de nulle part, en recherche inconsciente d'une bouée de sauvetage, d'un port d'attache, qu'on ne leur indiquera pas..... par respect de leurs singularités culturelles, supposées par un corps enseignant, débordant de bonne volonté, touchant de dévouement, mais un dévouement dévoyé par l'idéologie dominante.
Car, ce qui navrant par dessus tout, c'est la « possession » de ces éducateurs par l'ambiance actuelle dans le monde de l'éducation, par cette pédagogie qui met entre parenthèses que l'enfance n'est en rien ce que nous en dit le mythe dominant : un être fondamentalement bon mais dévoyé par une société d'où viennent tous les maux. « Tout homme a besoin d'un maître » disait Kant qui n'avait pourtant rien d'un réactionnaire obtus. La spontanéité bonne de l'enfant est le mythe qui détruit actuellement des siècles de réflexion pédagogique. Et pas seulement à l'école, mais dans la famille qu'elle ronge et qu'elle dévore.
Il faut voir comment, lorsqu'il faut bien se résigner à tenir un conseil de discipline après un incident vraiment inadmissible, tout ce petit monde, si peu « professoral », est hésitant, ravagé par l'incertitude, au bord de la dépression nerveuse, avant de prendre la décision sans laquelle rien ne serait plus possible, même pas la régularisation de la morve. En ce milieu, nul doute que le mot de « sévérité » soit bien plus inacceptable que les pires borborygmes éructés par les jeunes barbares.
En Guadeloupe aussi, me disent des collègues ( parfois jeunes ) la situation se détériore d'années en années, sans avoir atteint les « points de perfection » dont la région parisienne semble, pour l'instant, détenir le monopole.
On me cite des cas de menaces de mort proférés contre des professeurs. Et des parents qui, avec virulence, viennent au lycée, pour soutenir leurs enfants dans leurs excès les moins justifiables. Ne faut-il pas qu' « ils » s'épanouissent?
Peut-être serait-il temps que l'on réagisse. Et ce ne sera pas en faisant l'économie d'une remise en question des mauvais principes dominants depuis longtemps, et particulièrement depuis les fameux évènements de mai 1968.
On a compris que cette « révolution ne pourra pas avoir lieu avant cinq ans. En admettant que la « droite » se résolve, enfin, à labourer ce champ de réflexion qu'elle a par lâcheté abandonné à la gauche, toujours plus sûre d'elle-même et dominatrice.
Edouard Boulogne.
( En post-scriptum, et dans le même ordre d'idée, on peut trouver matière à réflexion dans le site ci-dessous du Think-Tank SOS-Education.
La vérité sur la souffrance des professeurs
Professeurs... respectons-les !
Agressé au cou, insulté sur son portable, harcelé, volé...
Le professeur est pressé de toutes parts, entre l’inertie de la hiérarchie, la pression des parents, la violence croissante et impunie des élèves, et l’absence de solidarité des collègues (quand
ce ne sont pas des regards accusateurs).
Les professeurs se replient sur eux-mêmes. Ils ont de moins en moins la force de s’en sortir tout seuls. Les autres les accusent d’autant plus. Le cercle infernal se referme.
SOS Éducation milite pour que la souffrance des professeurs soit reconnue.
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