20 Octobre 2011
Pas plus que vous, probablement, je n'ai envie de pleurer la mort de Mouammar Kadhafi.
Depuis tant et tant d'années qu'il faisait régner son désordre despotique sur la malheureuse Lybie.
Et aussi, ces dérives, ces provocations de plus en plus vulgaires qu'il adressait à l'occident, et tout récemment encore, en Italie, à Paris, étaient exaspérantes.
Sans doute se permettait-il ces actes délirants à cause du sentiment d'impunité qu'il nourrissait à l'égard de ces puissances, à ses yeux, « décadentes ». Et, il faut reconnaître que l'on pouvait facilement s'y tromper.
En tout cas, lui, s'est trompé, au moins à court terme. Et cette erreur lui a été fatale. Car c'est bien cet « occident » qui a eu sa peau, et nullement les « insurgés » qui paradent à Tripoli, et ailleurs. Oui, l'occident, même si ses raisons ne sont pas nécessairement très propres; bien éloignées en tout cas de la défense des « droits de l'homme » dont il se targue. Rien de nouveau sous le soleil, à cet égard.
Sans pleurer Kadhafi, il est possible, comme il en est pour moi, de regarder avec effroi, mépris, et un soupçon de pitié, les circonstances affreuses de sa mort.
Est-il mort, sous l'effet d'une bombe lancée par la « coalition »? d'une balle au front, ou au côté? C'est ce voudrait faire croire ladite coalition pour des raisons plus ou moins politiques.
Un film, pris d'un téléphone portable nous montre tout autre chose : un véritable lynchage, affreusement mené par une foule hystérique.
Sans doute cette scène est banale dans l'histoire, et pas seulement à l'égard de despotes chargés de crimes. Des innocents, désignés à la vindicte populaire pour leurs seules « différences », parfois leur supériorité par rapport au vulgaire, ont été des centaines de milliers de fois dans l'histoire des hommes, massacrés, réduits en charpie par la sauvagerie des foules. « Libérez Barabas », glapissaient-ils à Jérusalem, il a deux mille ans.
L'un des « indignés » de Syrte, hurlait ce matin « Kadhafi est un chien, il est mort comme un chien ».
Je crois que l'ami de l'homme ne mérite ni cet excès d'honneur, ni cette indignité ».
La scène de la « mise à mort » était vraiment horrible, pouvant susciter la pitié, même à l'égard d'un Mouammar Kadhafi.
« La volonté de la foule est toujours l'indice du pire », disait je ne sais plus quel philosophe stoïcien. Eclatante vérité!
Mais non moins terrifiantes, ces images d'archives, où l'on voit le dictateur reçu par des grands dirigeants du monde de la politique mondiale, et des Etats policés, celle, par exemple d'un des fils de Kadhafi, ( abattu aujourd'hui aussi, parait-il ) reçu avec tous les égards à Washington par madame Clinton, il y a un an à peine. Toutes ces mises en scène, cette hypocrisie, ces prévenances, ce faux-semblant. « Elie! Elie! Lama sabachtani »!
Disons-le aussi, pour les mêmes raisons, Alain Juppé, aussi froid, hautain et constipé que d'habitude a perdu une bonne occasion de se taire aujourd'hui. Son oraison funèbre du dictateur était aussi terrifiante, quand on veut bien prendre un peu de distance pour réfléchir, qu'indécente.
Faut-il leur pardonner? Savent-ils tous ce qu'ils font, ces gens là, les mauvais et les bons, selon les critères du monde?
Odi profanum vulgus, et arceo : ( je hais la foule vulgaire, et je m'en écarte), disait le sage.
Mais en nos temps « démocratiques » est-il une thébaïde, où l'on puisse encore se réfugier?
Mard Decap.
Lien ajouté le 21 octobre 2011 à 09 heures :