Deux informations sur Haïti ce 4 février au matin. L’une factuelle ; selon le Premier Ministre, Jean-Max Bellerive, le nombre des morts et des disparus passe de 170.000 à 200.000. L’autre plus développée et étendue puisque sur Europe 1, Jean-Pierre Elkabach interviewe l’ambassadeur de France en Haïti de passage à Paris et qui doit regagner son poste à Port-au-Prince le lendemain.
Comme on le verra dans la suite par d’autres sources, le gouvernement haïtien a pour mot d'ordre que, selon une formule bien connue ailleurs, l’ordre règne à Port-au-Prince. On comprend donc aisément que l’ambassadeur de France se montre de la plus grands prudence dans des propos qui peuvent tout à fait être écoutés ou rapportés là-bas et donc lui être reprochés à son retour. Prudence diplomatique donc! Il faut dire que le « journaliste » Elkabach ne lui complique pas trop la tâche.
Les anicroches entre la France et les Etats-Unis ? Pas du tout, tout va pour le mieux et l'entente est parfaite !
Rivalités et le désordre entre les ONG ? En aucune façon et chacun fait de son mieux et pour le mieux.
Les équipes de secours françaises ? Elles ont été en tous points admirables ! L’ambassadeur évoque surtout celles qui sont venues des Antilles, mais ne parle pas du premier et principal groupe, venu de Brignoles, qui ne s’est guère occupé que de l’Hôtel Montana, à la recherche des clients français et étrangers. A preuve cet admirable titre de première page dans la Provence : « Haïti : un Marseillais sauvé des décombres », au Montana bien entendu et après quatre jours de recherches, tandis qu'agonisaient des centaines de victimes haïtiennes pourtant repérées et entendues. Un de me amis antillais, qui a croisé les sauveteurs brignolais en escale à Pointe-à-Pitre, m’a dit qu’il avait trouvé dans ce groupe une atmosphère très joyeuse, genre colonie de vacances !
Les amputations et les divergences chirurgicales entre Français et Américains ? Pas du tout, « Chacun a sa méthode » mais tous font pour le mieux !
Les adoptions et le sort des enfants ? Là encore tout a été au mieux possible et très responsable ; il faut être très prudent sur ces affaires ! De toute évidence monsieur l’ambassadeur, pourtant en poste depuis six mois, n’a jamais entendu parler, comme beaucoup d'ailleurs, des « restavek » ! Un ami, que nous avons en commun et qui me lit peut-être, devrait bien lui toucher un mot de cette triste coutume du pays !
Bref, du Pangloss diplomatique ; tout est pour le mieux dans le meilleur des Haïti possibles !
Pour être un peu mieux informé, je ne saurais trop vous recommander la consultation du site du principal quotidien haïtien, le Nouvelliste (lenouvelliste.com), dont on peut lire, en temps normal, l’édition quotidienne sur internet. Tout cela s’était naturellement interrompu mais, même si elle est encore réduite et lacunaire, l’information y est non seulement plus étendue mais surtout plus fiable que dans nos médias.
Il faut tout de même bien que je justifie le titre de ce post. Au moment où j’écoutais Europe1 vers huit heures et quand j’ai appris que le nombre de morts était passé de 170.000 à 200.000, j'ai constaté que j'avais reçu d’amis haïtiens deux courriels qui m’apprenaient l’un et l’autre que trois professeurs de la FLA étaient morts (ce que je savais déjà par le Québec), aussi aussi et surtout que 200 étudiants étaient morts ou avaient disparu dans l’effondrement de la Faculté de Linguistique Appliquée de Port-au-Prince, ce que je n’avais jamais ni lu ni entendu nulle part ! Je dois dire que cette annonce m’a davantage ému que l'augmentation du nombre total des victimes.
On m’en fera peut-être grief, mais, l’escalade funèbre de 170.000 à 200.000 victimes, en attendant sans doute une nouvelle estimation, m'a moins bouleversé que d'apprendre qu’étaient morts deux cents étudiants, auxquels, dans les deux années précédentes j’avais fait des conférences, dans des lieux qui m’étaient, de ce fait, familiers et qu’en outre parmi eux, se trouvaient nombre d'étudiants et d'étudiantes présents à un colloque que j’avais organisé en Haïti fin 2008, où nous les avions invités, en les prenant naturellement en charge, et avec lesquels nous avions passé toute une semaine à travailler et à converser!
En tout état de cause, je pense que ceux et celles qui voudraient avoir sur la situation en Haïti des informations un peu plus précises et par là plus exactes que celles qui émanent du gouvernement peuvent se reporter au site du Nouvelliste (lenouvelliste.com) dont je vous donne ci-dessous, sans commentaire, quelques extraits.
"Le gouvernement a toujours été en prise avec les événements et contrôle la situation", a-t-il affirmé dans une interview à l'AFP. Malgré ces propos, la colère de la population contre le gouvernement s'est exprimée lors de plusieurs manifestations mardi et mercredi
"Ils ne nous
ont pas donné la nourriture qu'il faut", a déclaré à l'AFP Sandrac Baptiste, qui manifestait dans la matinée à Pétion-Ville, dans la banlieue de
Port-au-Prince.
Un autre protestataire, un bloc de ciment à la main, a crié qu'il était prêt à se battre. "Si la police tire sur nous, nous mettrons le feu", ont dit en choeur
les manifestants.
La ministre chargée des femmes, Marjorie Michel, a signalé à l'AFP que des comités de quartier avaient fait état d'une augmentation du nombre de viols dans les camps ces derniers jours
Sur le plan
institutionnel, l'ONU a demandé à l'ex-président américain Bill Clinton, son émissaire spécial en Haïti, de coordonner l'aide internationale.
Des soldats de l'armée américaine ont confisqué la caméra d'un photographe du Nouvelliste et
détruit des photos qui s'y trouvaient ce mercredi 3 février 2010 en fin de matinée. Le photographe Homère Cardichon couvrait pour le journal une manifestation
d'une centaine de personnes devant les locaux de l' ambassade des Etats Unis d'Amérique à Tabarre, dans la banlieu de Port-au-Prince.
Des centaines de citoyens ont protesté ce mercredi 3 février devant les locaux de la mairie de
Pétion-Ville. Pancartes en main, slogans et propos désobligeants, ces citoyens visiblement en colère, adressaient des reproches au maire de Pétion-Ville, Claire
Lydie Parent, qu'ils accusent de procéder à une mauvaise distribution de l'aide alimentaire reçue dans le cadre du programme d'urgence pour les survivants du
tremblement de terre. « Mme Parent nous fait marcher depuis deux semaines. Elle nous donne quotidiennement rendez-vous dans sa localité à Mahaman sans rien nous
donner », se plaint un jeune homme adossé contre un pan de mur de la mairie.
Un habitant de Morne Lazarre, un des quartiers les plus dévastés par le séisme du 12 janvier,
accuse directement Mme Parent qui selon lui, aurait stocké l'aide de la communauté internationale pour en faire du commerce. « Le riz est en vente libre à la
mairie, dit-il, d'un ton révoltant. C'est méchant et très injuste ». A noter, le week-end écoulé, qu'un jeune homme avait été surpris entrain de vendre des
cartes d'accès gratuites livrées par les autorités municipales au prix de 100 gourdes dans les parages de la place Saint-Pierre à Pétion-Ville.
A Delmas, Carrefour et dans d'autres localités de la zone métropolitaine, des gens sont dans une situation de famine dans certains camps de fortune. « Les convois arrivent ici rarement"
Plusieurs
centaines de manifestants ont défilé mercredi dans les rues de Port-au-Prince, demandant au gouvernement travail et nourriture, tandis que le climat se dégradait
en termes de sécurité, ont constaté les journalistes de l'AFP.
"On ne veut
pas de journalistes ici", ont ajouté plusieurs individus présents dans la foule à l'adresse des photographes et reporters venus sur les lieux.
Plusieurs coups de feu ont été entendu, dans la nuit de mardi à mercredi, à Pétion-Ville, quartier huppé de la capitale haïtienne et les journalistes toujours
présents dans la capitale, trois semaines après le séisme, percevaient un début d'hostilité à leur encontre »
Sans commentaire ! "L'ordre règne à Port-au-Prince" mais pour combien de temps encore?