30 Novembre 2012
( 1er décembre. Voici qu'approche Noël, à grands pas. Et voici, pour les amateurs de contes de Noêl nombreux, celui-ci, d'une amie du scrutateur ).
Le Noël de Compère Michaud
(conte-fable de Noël créole de Fleur de Vanille)
Michaud veillait
La nuit dans sa chaumière
Près du hameau
En gardant son troupeau.
Face aux étoiles il s’émerveillait
Quand , provenant d’une vive lumière,
Un futur chargé de malédiction
Vint à lui comme une révélation.
Dans une brume lointaine,
Fragile comme de la porcelaine,
L’île papillon avait de ses ailes
Perdu l’éclat chatoyant
Et des profondeurs de l’irréel,
De sa chrysalide ainsi renaissant,
Avait ressurgi tel un spectre.
Régnait alors en grand traître
Dans un palais avilissant,
Domo-Hérodius le tyran coriace.
Insensible aux suppliques incessantes
Des chômeurs, victimes innocentes,
Il avait ordonné que l’on égorgeat
Dès le berceau les entreprises naissantes.
Rejetés de façon débilitante,
Les investisseurs roi-mages
S’en étaient allés vers d’autres rivages
Fructifier sous de plus aimables cieux
Leurs capitaux précieux.
La misère, en gangrène dévoreuse,
Avait de la Pointe la miséreuse,
Consumé le cœur de vieille courtisane
Et de la prostituée que tout condamne,
Ne restait plus que des haillons
Que s’efforçaient de rassembler ses moignons.
Ne restait de son ancien talisman,
vestige d’une mutualité au temps d’antan,
Que la façade décrépite d’un musée
Dont tous avaient obligation, sans être amusés,
D’admirer la gloire défraîchie
D’une lutte destructrice avachie.
Défilant devant des reliques exposées,
Les crédules aux yeux stupides
Admiraient ainsi les vieux pneus explosés,
D’antiques gwo-ka de ralliements perfides,
Les cageots dégingandés tout vermoulus
Et les caisses de bois rafistolées
Qu’avaient maintes fois à la volée
Frappé avec force les dominos
Au nom d’abus anticoloniaux
Prétexte d’un abêtissement voulu.
La famine ayant de ses crocs maudits
Rogné des ventres l’arrondi,
Tous les soirs, sur le trottoir crasseux
Du palais des mille et un mensonges,
L’appel à la galette de terre populaire
Etait lancé dans l’air
Un peu comme dans un songe,
Par de maigres tambouyeurs osseux.
Dans le calme de la nuit,
Michaud à moitié endormi,
Sentit de son ragoût de porc monter la bonne odeur
Et pensa qu’il était pour lui l’heure
De le manger avec ses pois de bois
Et ses ignames tout chaud
Avant que son ventre ne soit aux abois.
Sans doute, avait-il reçu de là-haut,
Se dit-il, un message de l’ange de Noël
Qui, en effleurant son front de son aile
Lui avait insufflé sa lumineuse sagesse
Le conseillant ainsi avec justesse.
Il loua alors le ciel en cette nuit de fête
De pouvoir encore manger un repas convenable
Et comprenant qu’il serait bien bête
De faire confiance à des LKPistes minables.
Lady Fleur de Vanille de la Fontaine des Isles.
Poétesse de la Majorité Silencieuse.