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Guadeloupe, la souffrance entretenue.
Gérard La Viny est décédé il y a quelques jours. Cela n’évoque peut-être plus grand-chose à certains mais tout le monde se souvient et connait « ba mwen an Ti Bo Doudou »
…
Mais Gérard La Viny est mort à Paris et en Guadeloupe il n’était pas tellement apprécié car beaucoup lui collaient l’étiquette de « doudouiste ».
C’est un qualificatif qui est difficile à définir, qui concerne une période de la littérature antillaise mais on pourrait le résumer (mal …) par tout ce qui aurait tendance
à montrer la société guadeloupéenne de façon trop lisse et édénique et surtout … trop souriante.
Car certains ont décidé que ce petit morceau de France tropicale doit être une terre de misère. La culture, la tradition, l’héritage, le mode d’expression et tout ce qui
nous entoure se doivent d’être tragiques, empreints de la lourde cicatrice d’une douleur profonde qui est exposée, mise en scène et en évidence, exploitée sans retenue ni
scrupule.
On a dans quelques cerveaux aux visées dictatoriales décidé que la Société Antillaise devait être un monde de souffrances absolues et permanentes et quelques uns tiennent à
ce statut comme à la prunelle de leurs yeux.
Etrangement d’ailleurs, car cet état d’esprit n’est pas si vieux que cela et les anciens doivent bien se demander pourquoi leur monde est devenu un univers de régression
marqué au fer rouge par la nécessité impérative de démontrer qu’ici on souffre sans cesse et de façon maladive.
Notre Société Antillaise est bien complexe convenons-en car au lieu de profiter avec jouissance et bonheur des bienfaits que Dame Nature lui octroie (climat, paysage, mer
tropicale …) et des nombreux avantages que son statut lui offre, Elle s’obstine de façon obsessionnelle à ne pas en profiter et à se complaire dans une vision du monde
tragique, morbide, déprimante et déprimée.
Et cela empire depuis peu de façon alarmante sous la pression de quelques dictateurs de la pensée qui ont décidé de surfer sur une seule vague ici, la souffrance d’un peuple
sans identité enchainé ...
Mais enchainé par qui ?
Et d’où vient cette obsession locale récurrente jusqu’au radotage de cette problématique de l’identité dont on se brosse le nombril avec beaucoup d’autosatisfaction ?
N’en déplaise aux Antillais, le boulet qui maintient l’enchaînement des individus ici est dans leurs têtes et nulle part ailleurs !
Et cette question de l’identité n’est qu’un faux débat qu’on entretient pour attiser sans fin une sourde colère qui est le fond de commerce de ce pays et sa seule façon de
fonctionner.
Personne ne donne son identité à un peuple, il n’a qu’à se débrouiller tout seul pour régler cette question encore faut-il qu’il en ait envie. Ce n’est certainement pas la
métropole qui est préoccupée par cela. Cette question là-bas n’intéresse absolument personne. Si les Antillais ont un problème d’identité et bien qu’ils se dépêchent de le
résoudre entre eux car le reste du monde s’en contrefiche et ils en paient personnellement chaque jour le prix fort et cela ne dérange personne d’autres qu’eux-mêmes.
Si les Antillais ont le sentiment d’être enchaînés et bien qu’ils commencent à balayer devant leurs portes pour chasser tous ces petits tyrans de la pensée unique qui sont
en train de les isoler du reste du monde, de les faire régresser, de les entrainer vers le gouffre sans fond d’un appauvrissement culturel inquiétant.
Des exemples ?
La culture …. Ici point de spectacle « culturel » qui n’ait pour base la période de l’esclavage, la souffrance des ancêtres, la grande révolte ou l’épopée Delgrés ou tout ce
qui tourne autour de ces thèmes mille fois rabâchés.
La musique …. Depuis peu la Guadeloupe subit l’oppression du Gwo Ka. Cette île qui a connu une diversité réjouissante et riche de musiques variées, élaborées et entrainantes
doit maintenant se contenter de soirées et festivals Ka à ne plus savoir qu’en faire. A croire que le Ka (rien à redire contre cette forme de musique …) est devenu LA
musique des Antilles avec sa symbolique souffrance du peuple Noir, rébellion historique, tragédie savamment exposée et mise en scène. Le Ka entre les mains des tyrans
actuels de la pensée locale est même en train de perdre sa personnalité pour n’être plus qu’un cri de souffrance permanent.
La littérature … à peu de chose prés, subit la même tyrannie que les autres arts ici. Il faut qu’elle soit tragique, terrible, sinistre.
Le Créole … ce beau et chatoyant patois érigé en langue régionale est en train de perdre sa bonhommie chatoyante lorsqu’on entend des Nomertin, des Clavier, des Domota le
trahir en lui donnant des accents de haine et de colère. Dans la bouche de ces tristes individus le Créole devient sordide, combatif, déformé souvent agaçant. Lui qui
n’était à l’origine qu’unité et volonté de se comprendre n’est plus qu’un moyen d’exclusion et de rejet.
Et plutôt que le sempiternel et peu utile Mois du Créole (qui n’est pas en danger si on le respecte et n’en fait pas une arme) on aurait sans doute été bien inspiré de faire
un Mois de l’Anglais pour faire comprendre à nos jeunes l’intérêt de maitriser cette langue internationale indispensable. Il vaudrait mieux prôner l’ouverture sur le monde
que le repli sur soi.
On peut trouver bien d’autres exemples dans de nombreux domaines.
Ce n’est pas qu’il faille gommer son histoire ou ses traditions, soyons bien clairs ! C’est tout simplement qu’il faut éviter qu’elles ne deviennent la seule vision du monde
et que le passé occulte l’avenir. Il faut connaître son histoire pas se noyer dedans.
Et la liste serait longue de cette volonté actuelle de faire régresser la société Antillaise pour lui enlever son beau sourire, ses couleurs vives et agréables, pour n’en
faire qu’un cri de haine et de colère.
Nous sommes passés d’un monde de lumière à celui d’un monde de la souffrance obligatoire. Entre les mains de quelques tyrans imbéciles et rétrogrades la Guadeloupe a perdu
son sourire et ses atours. Elle deviendrait presque un endroit où il ne fait plus bon vivre et beaucoup la quittent. Quel dommage !
Et c’est cela le vrai problème de notre île d’aujourd’hui.
Une grande partie de la population antillaise est maintenue dans la souffrance par une culture collective qui se complait dans le sombre et le morbide, la colère et la
haine.
Ici la règle est de ne pas exprimer ses sentiments profonds. On tait, on cache, on dissimule. Même dans le cadre omniprésent et souvent pesant de la cellule familiale,
l’individu n’a pas le libre accès à la parole. Combien sont nombreuses ici les tragédies au sein des familles qui ne sont jamais dites, exprimées, abordées. Et pourtant ce
n’est pas faute de multiplier les réunions les dimanches et fêtes mais y a-t-on le droit à la liberté expression ?
La Société Antillaise est une société du Silence ! Du non-dit, du non-avoué !
On souffre oui mais en silence car on ne peut se confier ou s’exprimer librement, cela ne se fait pas. Il règne au sein de certaines familles antillaises des stress
terribles, des silences étouffants, des oppressions insupportables…
Et que dire de cette histoire du LKP qui divise l’île. Combiens osent vraiment dire ce qu’ils pensent ? Quel est le poids de l’Omerta qui opprime la libre parole, la libre
pensée Guadeloupéenne ?
Notre société est en souffrance car Elle ne dit pas souvent ce qu’elle pense vraiment et Elle se laisse manipuler, mépriser, torturer par certains parce qu’elle ne s’exprime
ni clairement ni sincèrement.
Cela finit par générer une sourde colère et de profondes frustrations qui ne s’expriment jamais et sont la base de la violence sous-jacente mais permanente des liens sociaux
et collectifs. Cette violence explose au moindre grain de sable, elle est sans limite, vite incontrôlable et donne les résultats et les tragédies que nous connaissons depuis
des décennies. De plus cette violence donne du monde Antillais une image dévalorisante et réductrice.
L’Antillais vit sur les nerfs, en permanente tension, sous le regard oppressant de l’Autre, sur la loi implacable du Paraître, du « qu’en dira-t-on ». Il doit se conforter à
la règle impérative qui régit tout ici, la souffrance et la colère. Et on n’abordera pas par faute de temps les problèmes et les douleurs des femmes dans la société
antillaise, l’éducation des enfants, la structure complexe et en péril de la cellule familiale, l’omniprésence de croyances religieuses marquées par le poids de certaines
sectes, l’omniprésence aussi de la magie et l’emprise du Mal et des « amarres » des uns sur les autres ….
Etrange société qui aime se faire mal, se torturer, se mépriser, se complexer sans fin et sans raison.
L’histoire des Antilles est comme toute l’Histoire de l’Humanité, par moments terrible, par moments ordinaire sans plus. L’Humanité toute entière a connu des drames qui
dépassent la raison. Cela n’excuse rien, n’explique rien mais devrait juste justifier que l’on cesse ici de se croire seules victimes d’un drame unique et de
s’auto-flageller avec un passé que l’on a de toute façon pas connu et qui est comme tous les passés… définitivement passé. A vouloir de force entretenir des cicatrices
virtuelles on a fait pourrir toute la vision que l’on a de soi et du monde dans lequel on vit.
Le présent des Antillais n’a rien de cette tragédie que l’on se complait à décrire en ce moment de façon à abuser la métropole. Certains problèmes économiques existent bien
entendu, il y a dans notre île des inégalités comme ailleurs, des injustices comme ailleurs, mais la crise est ici nettement moins sensible qu’ailleurs et le niveau de vie
réel des Antilles est en réalité bien supérieur à celui de pas mal de régions métropolitaines.
Il faut le dire en regardant les Français de l’hexagone dans les yeux et cesser de se cacher derrière une longue série de mensonges qui ne nous honorent pas.
Car voila…
Peut-être la Société Antillaise aime-t-elle se complaire dans un passé qu’elle a décidé de ne voir que tragique parce qu’elle en tire finalement profit.
En entretenant complaisamment et avec outrance cette image du passé esclavagiste, colonialiste, on force la métropole à nous être éternellement redevable. Elle nous doit
compensation permanente et même si personne n’ose le dire, beaucoup pensent que finalement, au titre des « réparations » du passé, la France doit continuer à lâcher ici des
tonnes d’argent pour entretenir un système de vie pas toujours très honnête mais plutôt cossu. Bien sûr personne ne va l’avouer mais beaucoup considèrent que la France doit
« cracher au bassinet » et qu’il est normal que les métros de là-bas continuent à payer pour se faire pardonner le passé de leurs lointains ancêtres esclavagistes (encore et
toujours …) C’est un chantage rentable et très intéressé qui n’a en vérité rien de bien identitaire …
Le passé est un fond de commerce surexploité aux Antilles dans lequel certains ont perdu leur âme, leur honneur et leur fierté.
Car on doit aussi le dire, on est habitué en Guadeloupe à une société à deux vitesses et pas celles que l’on pense. Beaucoup d’Antillais aiment à pleurer misère mais ils
n’avouent jamais leurs revenus dissimulés, leur petites rentes de situations cachées, leurs petites magouilles qui leurs permettent d’obtenir la belle berline de grand luxe
toute neuve pour se pavaner, faire le coq et assurer le paraître. Combien ici dissimulent des revenus substantiels non imposés tout en parlant d’injustice sociale et du
mépris insupportable de la fwans kolonialiss?
Notre société est habituée à ces magouilles, elle aime cela et elle exige que personne ne s’y intéresse de trop prés. Il ne faut pas faire de vagues aux Antilles … La loi de
la République ne doit pas s’appliquer trop rigoureusement ici car beaucoup n’y ont pas trop intérêts.
Beaucoup d’Antillais aiment ne pas être comme le métropolitain, ils se veulent « spécifiques », à part, différents. Ils font semblant d’être misérables pour mieux rouler le
système et obtenir sans aucun scrupule des probantes sans limite ni contrôle.
Ici on sait se torde de douleur et crier famine au bon moment et à bon escient, juste pour le cinéma et l’obtention de subventions supplémentaires et attention cela se fait
à tous les échelons de la société.
Toute cette histoire du LKP n’est que l’expression collective de ce mensonge honteux, de cette colère savamment exploitée et orientée. Il n’y a rien de vrai dans le discours
du LKP et tout ce que l’on exploite et met en scène devant des caméras trop naïves n’est qu’une sombre perversité qui fait régresser cette île. Le débat du LKP n’est en rien
une lutte sociale c’est bien plus tragique que cela. Il s’agit de poser une chape de plomb sur toute une population pour la manipuler à loisir en entretenant de gré ou de
force une forme de souffrance obligatoire afin d’en tirer profits et pouvoirs ensuite.
Mais tous ces mensonges même collectifs ont un prix et ce prix est peut-être au fond du regard que chacun porte sur soi-même.
Peut-on être fier de soi quand on sait que l’on ne vit que dans une forme déformée de sa propre réalité ? Qu’elle image a-t-on réellement de soi lorsque l’on passe son temps
à mentir aux autres et à soi-même ?
Pourquoi cette société n’accepte-t-elle pas de « poser ses valises » et de prendre la vie sous un jour plus positif, plus constructif, moins violent, moins destructeur de
soi et de l’autre ?
Pourquoi les Antillais se sentent-ils obligés de se maintenir de force dans une souffrance artificielle, savamment entretenue, obsessionnelle et oppressante ? D’où vient
cette volonté farouche de se morfondre dans une nuée de complexes déstabilisants ?
Pourquoi ne pas voir le beau du monde et profiter des avantages que nous offre notre situation très privilégiée par rapport à nos compatriotes de métropole ? (et les en
remercier au lieu de leur cracher dessus)
Pourquoi ne pas se sentir propre et fier de soi en ayant une attitude et un comportement respectable et honnête ?
Pourquoi être sans cesse en train de mettre son avenir en péril dans des quêtes vaines et stériles d’une identité illusoire, d’un changement de statut sans intérêt, de
luttes et de déchirements sans fin ni limite ?
Pourquoi se complaire dans la colère et la haine alors que rien ne justifie les mensonges que l’on se fait à soi-même ?
On se croirait face à un grand adolescent trop gâté qui a tout pour vivre heureux et qui, méthodiquement, avec acharnement, passe son temps à se dénigrer, se détruire,
s’avilir, se faire mal, voire en fin de compte jouer avec l’image terrible du suicide.
Cette île doit retrouver sa joie de vivre et réapprendre à savoir regarder le bleu du ciel et la beauté de son environnement. Cette population doit s’ouvrir au monde,
arrêter de s’enfermer sur elle-même, de rabâcher son passé pour ne pas assumer son futur, de tout voir en sombre et se tourner vers une image lumineuse et positive. Il faut
qu’elle se libère de ces poids et discours fossilisés qui la font régresser. La victimisation entretenue est un fléau qui mine cette société de façon perverse et bientôt
irrémédiable.
ATTENTION ! Ce portrait ne concerne pas TOUS les Antillais, loin de là ! Beaucoup ici sont passés de l’autre côté de la barrière et vivent de façon tout à fait « normale »
et respectable. Ils ont compris l’intérêt de regarder devant eux et non derrière, de s’investir dans le futur plutôt que dans le mensonge, d’être des citoyens à part
entière, responsables de leurs vies et de leurs actes, d’être fiers d’eux-mêmes et d’être capables de se regarder dans la glace le matin… Ils n’ont rien à voir avec ceux qui
ont été décrits plus haut. Ils sont même peut-être majoritaires dans l’île et sans nul doute ce sont eux l’espoir de la Guadeloupe. Mais ils sont sans cesse opprimés,
bafoués, pris en otages, ralentis par les autres. De plus ils n’arrivent pas à se faire entendre parce que tout un système médiatique et politique les ignore et les méprise
pour des raisons obscures et complexes.
Ils attendent avec impatience d’être enfin entendus et écoutés. Est-ce si difficile à comprendre ou bien va-t-on devoir encore supporter longtemps l’obscurantisme et la
régression voulus et imposés par quelques esprits embrumés ?
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Pour soulagé tchè mwen
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