26 Mars 2009
La nouvelle peut surprendre après la polémique ouverte par Benoît XVI lors de son voyage en Afrique, mais l'Église catholique admet implicitement le préservatif pour lutter contre le sida. Son combat - totalement incompris - consiste à dire que ce moyen ne suffit pas, à lui seul, pour endiguer l'épidémie. Le quotidien officiel du Saint-Siège, l'Osservatore Romano, vient de le confirmer publiquement en admettant l'efficacité prophylactique du préservatif à condition qu'il soit associé à d'autres facteurs.
En première page de l'édition du dimanche 22 mars, un article sur «Église et sida» reconnaît que le préservatif est efficace «à 97 % contre l'infection» dans les meilleures conditions d'utilisation et «à 87 %» dans des conditions communes, comme en Afrique. Et le journal de citer l'expérience de l'Ouganda où des campagnes soutenues par le gouvernement, dites «ABC», ont été lancées contre le sida : «A» comme abstinence, «B» comme fidélité (be faithful), «C» comme préservatif (condom).
L'article précise aussitôt que l'usage du préservatif prévu par cette méthode n'est certes pas conforme «aux indications de l'Église», mais que les effets de cette campagne sont spectaculaires. L'Ouganda est ainsi «l'unique pays d'Afrique qui a obtenu de bons résultats» dans cette lutte contre le sida : «La fréquence d'infection dans la population est descendue de 15 % en 1991 à 5 % en 2001.»
«L'abstinence» en question est effectivement conseillée aux jeunes adolescents. L'âge moyen du premier rapport sexuel a ainsi été retardé de «15 à 19 ans». «La fidélité», recommandée aux couples, aurait permis de réduire de 60 % le vagabondage sexuel. La méthode prévoit, enfin, l'usage du préservatif. «Ces trois facteurs, insiste l'Osservatore Romano,ont une influence importante sur la réduction de l'incidence du sida.»
Cet article est suivi de l'interview d'un missionnaire combonien, un ordre religieux très présent en Afrique, médecin de son état. Le frère Daniel Giovanni Giusti a eu une expérience de plus de vingt ans dans un hôpital en Ouganda et reconnaît que «le préservatif a un rôle dans des épidémies localisées et dans des groupes particuliers : prostituées, homosexuels et drogués.»
Mais il ajoute que la campagne «ABC» a démontré que ce sont les deux premiers axes - lutte contre une sexualité précoce et fidélité - qui ont surtout été efficaces parce qu'ils ont créé un changement de comportement. Le préservatif restant, lui, «un recours pour ceux qui n'appliquent pas les deux premiers points de la méthode». Autrement dit, pour ce médecin catholique : «L'abstinence annule le risque pour les cas de transmissions sexuelles. La fidélité dans les rapports sexuels réduit le risque. L'usage du préservatif réduit le risque mais ne l'élimine pas.»
Sa conclusion ne met donc pas en cause le préservatif, en tant que tel, mais les campagnes le proposant comme seul moyen sûr. «L'expérience de terrain démontre que dans les pays où l'on a tout misé sur le tout préservatif, il n'y a pas eu - dans la population générale - des résultats satisfaisants comme ceux obtenus en Ouganda.»