Blog destiné à commenter l'actualité, politique, économique, culturelle, sportive, etc, dans un esprit de critique philosophique, d'esprit chrétien et français.La collaboration des lecteurs est souhaitée, de même que la courtoisie, et l'esprit de tolérance.
2 Février 2009
L'Eglise Catholique face aux provocations de Mgr Williamson, par Mgr Yves
Simon.
(Depuis 15 jours, Le Scrutateur est presqu'exclusivement concentré sur les importants débordements sociaux qui affectent la Guadeloupe. C'est normal. Mais le monde n'en continue pas moins à tourner. Il est par exemple question des déclarations innacceptables d'un évêque en rupture avec le Vatican, qui se répand en propos négationistes [ concernant le sort des Juifs dans les camps de concentration nazis pendant la 2ème guerre mondiale!]. Evidemment une certaine presse tente de salir l'Eglise tout entière, l'aubaine est trop belle, et Benoit XVI en particulier.
Pour ceux que cela interressent, et les catholiques en particulier, Le Scrutateur publie deux documents. Le premier qui date de ce jour, émane d l'agence de presse ZENIT (analyse de MGR Yves Simon). Le deuxième vieux de quelques jours déjà, provient de la Fraternité St-Pie X, cette communauté schismatique, que le pape tente de réintégrer, avec charité, moyennant son repentir,n comme il es fut, dans l'Evangile avec la parabole de l'enfant prodigue. Ce document est interessant.
Tout à l'heure, nous reviendrons à l'analyse de l'actualité eb Guadeloupe. E.Boulogne).
1er document : ROME, Lundi 2 février 2009 (ZENIT.org) - Dans « Lettre ouverte à ceux qui veulent bien réfléchir... », Mgr Hippolyte Simon, archevêque de Clermont et vice-président de la conférence épiscopale française, demande:
« Qui avait intérêt à salir la réputation du Pape ? »
Je ne sais pas si je suis en colère ou si je suis malheureux : la vérité
tient sans doute des deux. Mais trop, c'est trop, alors je dis : ça
suffit ! Le déchaînement médiatique contre le Pape Benoît XVI, qui aurait
réintégré quatre évêques intégristes, dont un négationniste avéré, ne
relève pas de la critique, mais de la calomnie et de la désinformation.
Car, quoi que l'on pense des décisions du Pape, il faut dire, répéter et
souligner que ces quatre évêques n'ont pas été réintégrés. Et donc, Mgr
Williamson, dont les propos tenus à la télévision suédoise sont
effectivement intolérables, n'est toujours pas revenu au sein de l'Eglise
catholique et il ne relève toujours pas de l'autorité du Pape. Les
informations qui parlent de réintégration reposent sur une confusion grave
entre levée des excommunications et réintégration à part entière.
J'accorde volontiers mon indulgence à tous les journalistes et à tous les
commentateurs qui ont pu confondre, de bonne foi, la levée de
l'excommunication et la réintégration pure et simple. Les catégories
utilisées par l'Eglise peuvent prêter à équivoque pour le grand public.
Mais la vérité oblige à dire que, selon le Droit de l'Eglise, ce n'est pas
du tout la même chose. Si on confond les plans on devient victime de
simplifications qui ne profitent qu'à ceux qui veulent faire de la
provocation. Et on se fait complice, involontairement, de ces derniers. De
façon habituelle, le grand public est en droit d'exiger d'un journaliste
sportif qu'il sache distinguer, par exemple, entre un corner et un essai.
Pourquoi l'Eglise n'aurait-elle pas le droit d'avoir aussi son vocabulaire
« technique » et pourquoi devrait-on tolérer des approximations aussi
graves simplement sous prétexte qu'il s'agit de religion ?
Reprenons donc exactement ce qui s'est passé. Suite à l'élection du Pape
Benoît XVI, en Avril 2005, les évêques de la Fraternité Saint-Pie-X, fondée
il y a plus de trente ans par Mgr Lefebvre, ont demandé à reprendre le
dialogue avec Rome, mais ils avaient mis deux préalables : premièrement, la
libéralisation du Missel de 1962, ce qui a été fait par le motu proprio, en
juillet 2007 et, deuxièmement, la levée des excommunications.
Que signifie la levée des excommunications ? Pour prendre une comparaison
familière, je dirai ceci : quand Mgr Lefebvre est sorti, c'est-à-dire quand
il a désobéi en ordonnant quatre évêques malgré l'avis formel du Pape,
c'est comme s'il y avait eu, automatiquement, une barrière qui était tombée
et un feu qui s'était mis au rouge pour dire qu'il était sorti. Cela
voulait dire que si, un jour, il voulait rentrer, il faudrait qu'il fasse
d'abord amende honorable. Mgr Lefebvre est mort. Paix à son
âme ! Aujourd'hui, ses successeurs, vingt ans après, disent au Pape : «
Nous sommes prêts à reprendre le dialogue, mais il faut un geste symbolique
de votre part. Levez la barrière et mettez le feu au clignotant orange ! »
Le Pape, pour mettre toutes les chances du côté du dialogue, a donc levé la
barrière et a mis le feu au clignotant orange. Reste à savoir maintenant si
ceux qui demandent à rentrer vont le faire. Est-ce qu'ils vont rentrer
tous ? Quand ? Dans quelles conditions ? On ne sait pas. Comme le dit le
cardinal Giovanni Battista Re [préfet de la Congrégation des évêques], dans
son décret officiel : « il s'agit de stabiliser les conditions du
dialogue ». Peut-être que le Pape, dans un délai que nous ne connaissons
pas, leur donnera un statut canonique. Mais pour l'instant, ce n'est pas
fait. Le préalable au dialogue est levé, mais le dialogue n'a pas encore
commencé. Nous ne pouvons donc pas juger les résultats du dialogue avant
qu'il n'ait eu lieu.
Là-dessus, la veille du jour où devait être publié le décret du Cardinal
RE, voici qu'une télévision suédoise publie ou republie les propos
clairement négationnistes de l'un des quatre évêques concernés, Mgr
Williamson. Le Pape, quand il a donné son feu vert à la signature du décret
par le Cardinal pouvait-il connaître les discours de Mgr Williamson ? Très
honnêtement, je crois pouvoir dire que non. Et c'est en un sens plutôt
rassurant : c'est le signe que le Vatican n'a vraiment pas les moyens de
faire surveiller tous les évêques et toutes les chaînes de télévision du
monde ! C'est donc ici qu'il ne faut pas se tromper d'interprétation : que
signifie cette coïncidence entre la signature d'un décret, prévue pour le
21 Janvier, et donc connue de Mgr Williamson, et la diffusion des propos
télévisés du même personnage ?
Que chacun se demande : à qui profite le crime ? A qui profite le scandale
provoqué par des propos d'une telle obscénité ? La réponse me semble
limpide : à celui ou à ceux qui voulaient torpiller le processus inauguré
par la signature du décret ! Or, pour peu que l'on suive un peu ces
questions et les différentes interventions de Mgr Williamson depuis
quelques années, il est clair que lui ne veut à aucun prix de la
réconciliation avec Rome ! Cet évêque, dont je répète, qu'il n'a encore
aujourd'hui aucun lien de subordination canonique vis-à-vis de Rome, a tout
simplement utilisé la méthode des terroristes : il fait exploser une bombe
(intellectuelle) en espérant que tout le processus de réconciliation va
dérailler. Il fait comme tous les ultras de tous les temps : il préfère
laisser un champ de ruines plutôt que de se réconcilier avec ceux qu'il
considère comme des ennemis.
Alors je le dis avec tristesse à tous ceux qui ont relayé, - avec
gourmandise ou avec douleur-, l'amalgame entre Benoît XVI et Mgr
Williamson : vous avez fait le jeu, inconsciemment, d'un provocateur
cynique ! Et, en prime, si j'ose dire, vous lui avez offert un second
objectif qui ne pouvait que le ravir : salir de la pire des manières la
réputation du Pape. Un pape dont il se méfie plus que de tout autre, car il
voit bien que ce Pape ruine absolument tout l'argumentaire échafaudé jadis
par Mgr Lefebvre. Je ne peux pas développer ici ce point. Je ne fais que
renvoyer à un article que j'avais publié dans les colonnes du journal Le
Monde, l'an dernier, au moment de la publication du Motu Proprio : « Quand
je lis, un peu partout, que le Pape accorde tout aux intégristes et qu'il
n'exige rien en contrepartie, je ne suis pas d'accord : il leur accorde
tout sur la forme des rites, mais il ruine totalement leur argumentaire sur
le fond. Tout l'argumentaire de Mgr Lefebvre reposait sur une prétendue
différence substantielle entre le rite dit de Saint Pie V et le rite dit de
Paul VI. Or, réaffirme Benoît XVI, il n'y a pas de sens à parler de deux
rites. On pouvait, à la rigueur, légitimer une résistance au Concile si
l'on pensait, en conscience, qu'il existait une différence substantielle
entre deux rites. Peut-on légitimer cette résistance, et a fortiori un
schisme, à partir d'une différence de formes ? »2
Pour un fondamentaliste, et qui plus est, pour un négationniste forcené
comme Mgr Williamson, Benoît XVI est infiniment plus redoutable que tous
ceux qui font l'apologie de la « rupture » introduite par le Concile
Vatican II. Car s'il y a rupture, alors il est conforté dans son opposition
à la « nouveauté ». Mais celui qui démontre paisiblement que le Missel de
Paul VI, la liberté religieuse et l'œcuménisme font partie intégrante de
l'authentique Tradition Catholique, celui-là lui enlève toute
justification.
J'ai bien conscience qu'il faudrait développer mon argumentation. Que
chacun veuille bien me pardonner de renvoyer aux sites internet où tout
ceci est visible. Mais je souhaite surtout que chacun veuille bien se
méfier des provocations trop bien montées. Quant à ceux qui s'obstinent à
répéter que Joseph Ratzinger a servi dans les Jeunesses hitlériennes,
qu'ils veuillent bien relire le témoignage qu'il a donné à Caen, le 6 Juin
2004, pour le soixantième anniversaire du Débarquement en Normandie, et
qu'ils se demandent ensuite ce qu'ils auraient fait à sa place... Quand on
hurle un peu trop fort avec les loups d'aujourd'hui, on ne fait pas bien la
preuve que l'on eût été capable de se démarquer des loups de l'époque...
Reste un point qui est second mais cependant très grave : il faudra tout de
même s'interroger sur la communication des instances romaines lorsqu'il
s'agit de sujets aussi sensibles. Après la polémique de Ratisbonne (qui
mériterait elle aussi d'être démontée attentivement..), j'espère - mais je
me réserve d'en parler plutôt en interne - que les responsables de la Curie
vont procéder à un sérieux débriefing sur les ratés de leur communication.
Pour le dire d'un mot, voici comment j'ai vécu les choses : Mercredi 21
janvier, les milieux intégristes italiens, qui croyaient triompher,
« organisent une fuite » dans « Il Giornale ». Aussitôt le tam-tam
médiatique, se met en route. Mais nous, membres des conférences
épiscopales, nous ne savons absolument rien ! Et pendant trois jours les
nouvelles - erronées, qui parlent à longueur de journée de réintégration -
prolifèrent dans tous les sens comme un feu de brousse. Tout y passe.
Arrive alors la « bombe » de Mgr Williamson... Et c'est seulement samedi
matin, - trois jours trop tard ! -, que nous recevons le communiqué
officiel du Cardinal RE. Comment voulez-vous que nous puissions remettre le
débat sur des bases correctes ? Le Cardinal Ricard s'y est employé, de très
bonne façon, mais le feu était parti, et plus personne ne pouvait alors
entendre une parole raisonnable.
Maintenant que la poussière commence à retomber, essayons de reprendre
calmement nos esprits. Comme disait ma grand-mère : d'un mal Dieu peut
faire sortir du bien. Le mal c'est que le Pape Benoît XVI a une nouvelle
fois été traîné dans la boue par une majorité de grands médias, excepté,
Dieu merci, La Croix et quelques autres. Beaucoup de catholiques, et
beaucoup de gens de bonne volonté, sont dans l'incompréhension et la
souffrance. Mais le bien, c'est que les masques sont tombés ! Si le
dialogue continue malgré tout avec les évêques de la Fraternité Saint Pie X
- sous réserve, bien sûr, qu'ils passent la barrière maintenant levée -, le
discernement pourra se faire, car tout le monde sait un peu mieux ce qu'ils
pensent les uns et les autres.
Pour conclure, j'ai envie de m'adresser aux fidèles catholiques qui
peuvent, non sans raison, avoir le sentiment d'être un peu trahis, pour ne
pas dire méprisés, en cette affaire : méditez la parabole du Fils prodigue,
et prolongez-la. Si le Fils aîné, qui avait d'abord refusé d'entrer dans la
fête, dit qu'il veut rentrer, allez-vous le refuser ??? Ayez suffisamment
confiance en vous-mêmes et en l'Esprit qui conduit l'Eglise, et qui a aussi
guidé le Concile de Vatican II, pour penser que la seule présence de ce
fils aîné ne suffira pas à étouffer la fête. Donnez à ce dernier venu un
peu de temps pour s'habituer à la lumière de l'Assemblée où vous vous
tenez...
+ Hippolyte SIMON,
Archevêque de Clermont, vice-président de la Conférence des évêques de France
2ème document : Déclaration officielle du Supérieur de la Communauté St-Pie X.
A propos de Monseigneur Williamson."Permettez moi s'il vous plaît de me présenter. Je suis le supérieur général de la Fraternité St
Pie X. J'ai été informé d'une interview donnée par Mgr Williamson, un membre de notre Fraternité, pour la TV "Sveridges", et publiée ce soir... Bien qu'on avait compris que l'interview ne devait
porter que sur des questions religieuses seulement, le journaliste demanda l'opinion du prélat sur des questions historiques.
Il est évident qu'un évêque ne peut parler avec l'autorité épiscopale que des questions de foi et de morale. Si il évoque des questions
séculières, son opinion à ces sujets ne représente que lui. La fraternité que je dirige n'a aucune légitimité pour traiter de ces sujets et n'en réclame
aucune. Notre seul et unique objectif est la restauration de la doctrine traditionnelle dans l'Eglise catholique.
Pour cette raison, nous sommes acceptés respectés et estimés dans le monde entier. Il est très dommage d'utiliser une interview religieuse pour introduire des questions séculières et
controversées avec l'intention évidente de mal représenter ou mettre à mal l'activité de notre Fraternité. Une telle "tentative n'atteindra pas son but. La Fraternité St Pie X ne renoncera
pas à son intention d'apporter la vraie Foi catholique et les sacrements aux fidèles catholiques qui y ont droit."
Conclusion, la Fraternité St Pie X se désolidarise de Mgr Williamson. Les propos qu'on lui reproche ne concerne pas la fraternité St
Pie X d'une quelconque façon.
PS: Au fait, tant qu'à faire d'y être, petit rappel:
Le père de Monseigneur Lefebvre, René Lefebvre, celui qui l'avait éduqué, celui qui lui avait appris à distinguer les systèmes
sains des attelages politiques qui mènent l'Europe à sa perte, n'a pas craint – en son temps – de résister jusqu'à faire couler son sang en mourant déporté au camp de Sonnenburg.
Filateur de Tourcoing honoré et estimé, il avait rempli un rôle important au cours du premier conflit mondial. Non mobilisable, il s'était mis à la disposition de l'Intelligence Service et avait
permis l’évasion d’un grand nombre de prisonniers. Il retrouva du service dans les réseaux de résistance dès l’année 1940, en transmettant des messages radiodiffusés sur Londres ou en recueillant
des prisonniers français, belges ou allemands. Le 21 avril 1941, ce lieutenant des Forces françaises combattantes, membre du réseau Zéro-France, fut arrêté par la Gestapo. D’abord incarcéré à la
prison Saint-Gilles de Bruxelles, il fut déporté en Pologne, au camp de Sonnenburg, celui qu'on appela le « Folterhölle », c'est-à-dire « l'enfer de torture », connu pour ses mauvais traitements
et brutalités et dont les dernières centaines de prisonniers furent éliminés à la mitraillette dans la nuit du 30 au 31 janvier 1945. D’abord tenu par les S.A., il était géré par les S.S. à
l’époque où le père de Monseigneur Lefebvre y entra.
Sans abandonner son chapelet, son missel et son imitation de Jésus Christ, René Lefebvre périt le 4 mars 1944. Son corps a disparu dans les charniers du système concentrationnaire nazi. Le 16
juillet 1953, une décision gouvernementale lui attribua la qualité de déporté résistant. C’est bien ce type de héros, fier et noble, défenseur de sa patrie et surtout de sa foi, quitte à donner
sa vie, que la Fraternité Saint-Pie X compte donner en modèle à la jeunesse. Ce n’est certainement pas ces tristes « héros » journalistiques si temporels et conformistes passés maîtres dans l'art
de l’amalgame et du dénigrement.