16 Septembre 2023
1) Statut de Victor Schoelcher, brisée à Fort de France. 2) La figure délicate d'Assa Traore, la délicate antiraciste que l'on sait.
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Je rendais ce jour-là des dissertations, énonçant seulement le nom de l’élève afin d’aller à lui pour lui donner sa copie. Je n’ai jamais annoncé les notes à voix haute : je laisse à chacun le droit de faire sa publicité, positive ou négative.
L’élève qui venait de recevoir son dû — et ça ne pesait pas lourd — a immédiatement protesté :
– C’est parce que je suis Noir que vous me sacquez, M’sieur ?
– Non, mon cher. C’est parce que c’est nul. Et avec ce que vous venez de dire, vous avez cette fois touché le fond.
Ce qui l’a conforté dans ses certitudes : je notais selon la couleur de peau du client. Que quelques Gaulois, ou prétendus tels, l’accompagnassent dans les tréfonds du classement lui importait peu. Il se sentait discriminé. Et à bien fouiller sa pensée, il croyait sans doute que sa couleur de peau, qu’il venait de me faire remarquer alors que je n’y pensais pas, devait lui valoir mon indulgence, voire quelques points d’avance au nom de la discrimination positive.
Cela se passait dans une classe de préparation à l’Heptaconcours des Sciences-Po de province, où notre équipe du lycée Thiers parvenait à faire réussir, bon an mal an, 50% d’une classe recrutée dans les trois lycées ZEP de Marseille. Des établissements tous situés dans ces « Quartiers Nord » qui égaient régulièrement l’actualité criminelle. Les autres entraient — sur concours aussi — à Kedge Business School, une école de Commerce et Management régulièrement classée dans les cinq meilleures formations françaises. Un vrai concours, anonyme, sans avantage acquis au nom de la seule mixité sociale : nous réalisions une vraie mixité pédagogique, en montant le niveau de ces jeunes gens au niveau des exigences des concours.
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À cette époque, vu la diversité ethnique de la classe à laquelle j’enseignais les rudiments d’une vraie culture générale, je commençais souvent l’année en balançant pleine face le discours du sergent Hartmann, au début de Full Metal Jacket — avec quelques modifications mineures pour l’adapter à la situation :
« Je suis Jean-Paul Brighelli, votre prof de culture générale. À partir d’aujourd’hui, vous ne parlerez que quand on vous parlera, et les premiers et derniers mots qui sortiront de vos sales gueules, c’est « Oui, M’sieur », tas d’punaises. Est-ce bien clair ? »
Je vous laisse imaginer la qualité du silence. Alors, après l’avoir savouré, je reprenais :
« Si vous ressortez de chez moi, les loulouttes, si vous survivez à mon instruction, vous deviendrez une arme, vous deviendrez un prêtre de la culture implorant le concours. En attendant ce moment-là, vous êtes du vomi, vous êtes le niveau zéro de la vie sur Terre. Vous n’êtes même pas humains, bande d’enfoirés ! Vous n’êtes que du branlomane végétatif, des paquets de merdes d’amphibiens, de la chiasse ! Parce que je suis une peau de vache, vous me haïrez… mais plus vous me haïrez et mieux vous apprendrez. Je suis vache mais je suis réglo ! Aucun sectarisme racial ici. Je n’ai rien contre les négros, ritals, youpins ou métèques. Ici vous n’êtes tous que des vrais connards, et j’ai pour consigne de balancer toutes les couilles de loups qui n’ont pas la pointure pour réussir. Tas de punaises, est-ce que c’est clair ? »
Il y a douze ou quinze ans, il y avait toujours un loustic qui repérait la référence et répondait : « Sir, yes, sir » — ce qui faisait rire tout le monde et détendait l’ambiance toujours un peu compassée du premier cours, ce qui était l’objectif. Plus récemment, j’ai renoncé à cette entrée en matière, plus personne ne comprenant le second degré — un trait caractéristique de la génération Z comme zéro.
« Je n’ai rien contre les négros, ritals, youpins ou métèques … » Je le dis ici hautement : je n’ai jamais vu qu’un élève était homme ou femme, blanc ou noir, marseillais ou martien. Ils n’existent à mes yeux qu’en fonction de leurs aptitudes et de leurs réalisations. Comme dit à peu près Sartre : « On est ce que l’on fait » — et l’on n’existe pas préalablement, en tant qu’élève. Je peux, hors cours, m’intéresser au cursus, à l’histoire familiale, aux traumatismes vécus par les uns et les autres. Mais en règle générale, je n’en ai jamais fait grand cas. Le fait qu’Untel arrive d’une fratrie de douze enfants — la norme parmi mes élèves comoriens — est-il plus ou moins traumatisant que la dérive en mer de Chine, pendant deux semaines, des réfugiés vietnamiens que j’ai eus en cours à la fin des années 1970, et qui un an plus tard étaient parmi les meilleurs élèves ? Nous sommes mauvais juges de ce qui est handicap ou non.
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Mais dans la culture de l’excuse que l’on cherche à nous imposer, tout est handicap, tout est prétexte.
Nous sommes entrés, depuis que décolonialisme et indigénisme sont montés sur le même bateau, dans une ère victimaire insupportable. Le Blanc est mis au banc des accusés par les « racisés » (percevez-vous comme moi ce qu’a de profondément raciste une telle dénomination, utilisée couramment par les organisations d’extrême-gauche ?), il est porteur de tous les crimes de Caïn. Et si par malheur il est juif, il est blanc au carré — voir Les Blancs, les Juifs et nous, le livre pas du tout raciste de Houria Bouteldja, l’égérie du Parti des Indigènes de la République, dont on se demande bien pourquoi il n’est pas interdit pour incitation à la haine raciale. « Sale Juive » est l’injure courante des gentils garçons basanés qui agressent les filles non voilées dans ma ville. Et les violent, parfois.
Et comme l’une d’elles se rebellait, il y a trois ans, elle a été ceinturée par un passant, qui lui a lancé : « Mais enfin, Mademoiselle, il faut les comprendre, c’est leur culture… »
Que les Arabes et les Noirs aient été, bien plus que les Européens, responsables de la traite des Africains est indicible : ainsi le veut la loi Taubira, exemple sidérant de mainmise du pouvoir sur l’Histoire et son enseignement. Que les Arabes aient joint à la traite la délicate attention de châtrer les hommes — ce qui explique le petit nombre de Noirs en Arabie, alors que les planteurs nord-américains ou brésiliens n’avaient pas eu l’idée d’en faire autant, préférant laisser leurs serviteurs proliférer pour leur plus grand profit — n’intéresse visiblement pas les organisations anti-racistes : on passe sur bien des horreurs, au nom de l’intersectionnalité des luttes. Tout comme les néo-féministes et autres chiennes de garde évacuent d’un geste négligeant le fait que des millions de femmes sont obligées de cacher leur corps, leur visage, leurs cheveux, de ne pas conduire ni d’aller à l’école et d’épouser des hommes qu’elles n’ont pas choisis — et éventuellement d’endurer des mutilations génitales rituelles. Le Blanc est le mal — l’exciseur, non, puisqu’il est racisé… Il n’y a pas de raciste noir, ni, par conséquence, de racisme anti-Blanc, puisque seul le Blanc est raciste, par définition. Même Victor Schoelcher, dont les statues ont été brisées en Martinique, et renversées en Guyane.
Le plus drôle, c’est que nombre de Blancs finissent par intérioriser cette culpabilité, avouent des fautes imaginaires, et plient le genou, style Black Lives Matter, devant les émules d’Assa Traoré, qui a fait de cette incitation à la repentance blanche un lucratif marché. Et de petites blondinettes bouffées de culpabilité s’offrent à des grands Noirs, parce qu’elles ont vu ça sur Xhamster. Et elles se repentent, oh oui ! à deux genoux.
Mais je reviendrai prochainement sur la sexualité des jeunes…
Sartre, dans Réflexions sur la question juive, explique avec pertinence qu’il est inutile de discuter avec un raciste parce que, dit-il, « il a la conviction des pierres » — et on ne convainc pas un menhir. Il faut lui taper dessus, longtemps, jusqu’à ce qu’il s’effrite. On ne convainc pas un croyant — et le wokisme fonctionne comme une religion. On fait comme les Florentins avec Savonarole, dont les « éveillés » sont les émules.
Jean-Paul Brighelli.