15 Avril 2023
Depuis quelques jours le scrutateur est en proie à des petits soucis sciatiques, (pardon, techniques, du moins en ce qui concerne le blog) à propos d'une nouvelle mouture.
Réparer tout cela est certes possible mais demande de la patience. C'est en train de se faire. Mais je demande de la patience, et de l'indulgence car jen'ai pas le désir de publier d'article sur la désespérante actualité française centrée sur le fracas des pantins de tous bords.
Aujourd'hui je propose un article de Boulevard Voltaire sur une nouvelle mouture des Trois mousquetaires, qui semble-t-il vaut le détour.(LS).
Attendu depuis des mois, Les Trois Mousquetaires : D’Artagnan, signé Martin Bourboulon, est dans nos salles. Ayant déjà connu une trentaine d’adaptations, dont les plus célèbres sont celles d’André Hunebelle en 1953, de Bernard Borderie en 1961 et de Richard Lester en 1973, le roman d’Alexandre Dumas a droit à une énième itération qui se veut plus « noire » que les précédentes. La production a choisi, pour l’occasion, de mettre les petits plats dans les grands avec un budget de 72 millions d’euros et une équipe de 300 personnes mobilisées pour huit mois de tournage intensifs. Comme la version de Bernard Borderie, celle de Martin Bourboulon fonctionne en diptyque : le second film, sous-titré Milady, ne sortira qu’en décembre.
Bien connue, l’histoire s’inscrit dans le contexte des guerres de Religion, sur fond de lutte contre la maison d’Autriche. Jeune Gascon monté à Paris afin de devenir mousquetaire du roi, Charles d’Artagnan (François Civil) provoque, malgré lui, trois hommes en duel : Athos, Porthos et Aramis. Interrompus par les gardes de Richelieu, les quatre héros les mettent en déroute, se lient d’amitié et apprennent de fil en aiguille que le cardinal ourdit un complot contre la reine Anne d’Autriche, épouse de Louis XIII.
Malgré quelques aménagements bénins concernant le personnage d’Athos (Vincent Cassel), qui se voit accusé de meurtre (et non plus d’être un faux-monnayeur), cette nouvelle adaptation des Trois Mousquetaires reste à peu près fidèle au roman d’origine. Si bien que les facilités du récit, propres au genre romanesque, sont avant tout celles d’Alexandre Dumas. Lequel cultive à loisir la légende noire de Richelieu, le « bourreau de La Rochelle », dont le rêve serait de prendre le pouvoir sur un Louis XIII docile et influençable – une vision doublement fausse de l’Histoire que l’on pardonne aisément à Alexandre Dumas.
Plus intéressant, contrairement au roman et aux films qui en ont été tirés jusque-là, cette version met l’accent sur les guerres de Religion : on nous dit grosso modo que la ligne politique du roi est d’empêcher la guerre avec les protestants (ce qui est véridique sur le plan historique) alors même que ceux-là multiplient les actes de terrorisme sur le territoire et que le tandem Richelieu/Milady fait tout pour déclencher les hostilités avec eux. Prise en tenaille entre deux partis bellicistes, la France n’a donc plus qu’un seul recours : notre quatuor héroïque.
Encore une fois, cette vision d’un Richelieu antiprotestant est un mythe. Il fut bien davantage anti-Habsbourg et, par conséquent, cultivait contre l’empereur Ferdinand (catholique) ses alliances protestantes avec les princes allemands, les Pays-Bas et même l’Angleterre…
À ce sujet — Cinéma : Vaincre ou mourir, ce que vaut réellement le film sur Charette
Toujours est-il que Les Trois Mousquetaires par Martin Bourboulon est un film d’aventure très bien troussé. Les acteurs sont au diapason, ceux en particulier qui incarnent les quatre héros. Leur plaisir à jouer ensemble est manifeste et communicatif. Si l’on déplore une photographie un peu trop sombre et un maquillage qui rappelle davantage la chaleur du far-west que le climat de nos contrées, l’esthétique visuelle est globalement soignée. Les amateurs de prouesses techniques, à coup sûr, admireront les combats à l’épée tournés en plans-séquences. Certains ajouts narratifs ont de quoi agacer, tel le passage où le religieux Aramis (Romain Duris) se permet de tailler un crucifix pour en faire un instrument de torture (!) ou la bisexualité de Porthos (Pio Marmaï), qui n’était pas non plus indispensable…
On ne boudera pas notre plaisir pour autant, il est si rare de voir au cinéma un film faire l’éloge des valeurs verticales, du dévouement, du patriotisme et de l’amitié virile. On se prend à rêver, rétrospectivement, de ce qu’aurait pu être Vaincre ou mourir avec de tels moyens techniques et financiers. Attention, une scène post-générique de fin vous attend.