21 Juillet 2022
Aux temps anciens le téléphone portable n'était pas inventé et Narcisse (quelques autres encore ) ne purent s'adonner à la passion du narcisisme.
Les chercheurs ont étudié des régions peu analysées pendant la Grande Famine telles que le Nord de l’Italie, le Sud-Ouest de la France et le Centre-Est de l’Europe. D’après eux, l’étude de ces zones permet d’obtenir de nombreuses informations afin de reconstruire l’ensemble des évènements météorologiques extrêmes et leurs effets socio-économiques.
Grâce aux rapports et aux archives de l’époque, aussi bien régionaux que municipaux, les chercheurs ont obtenu progressivement l’ensemble des pièces manquantes au puzzle. Par exemple, dans les archives administratives de Sienne, du comté de Savoie et de la région associée de Bresse, le développement économique de ces pays y sont mis en avant.
Il est ainsi possible d’estimer la production de blé et de vin dans la région française de Bresse et de la comparer avec la production de blé en Angleterre. Comme les rendements du blé dépendent des facteurs climatiques, notamment de la température et des précipitations, il est possible de tirer des conclusions sur le climat des années respectives à la production.
« Nous voulons montrer que le changement climatique historique peut être beaucoup mieux reconstruit si des sources historiques écrites sont incorporées aux archives climatiques. L’inclusion de la recherche en sciences humaines contribue clairement à une meilleure compréhension des conséquences sociales du changement climatique dans le passé et à tirer des conclusions pour l’avenir », explique le Dr. Martin Bauch du GWZO dirigeant le groupe de recherche junior.
Ces dernières années, on parle beaucoup du réchauffement climatique et de ses conséquences sur la variabilité des saisons des pluies, mais aussi sur l’intensité et la fréquence des sécheresses. D’après les données des chercheurs, à partir de 1304, plusieurs étés chauds et très secs se sont succédé en Europe Centrale.
« Des sources du Moyen-Orient font également état de graves sécheresses. Les niveaux d’eau du Nil, par exemple, étaient exceptionnellement bas. Nous pensons donc que la sécheresse de 1304-1306 n’était pas seulement un phénomène régional, mais elle avait probablement des dimensions transcontinentales », explique le Dr. Thomas Labbé du GWZO.
Cette vague de sécheresse, entre 1303 et 1307, désignée comme historique au cours des XIIIe et XIVe siècle, peut aujourd’hui s’expliquer. Grâce aux évaluations de la sécheresse intensive de l’année 2018 et de plusieurs évènements extrêmes similaires, il est maintenant possible de prévoir « une balance des précipitations », c’est-à-dire un contraste marqué entre des précipitations extrêmement élevées dans une partie de l’Europe et des précipitations extrêmement faibles dans l’autre partie.
« Cela est généralement dû à des zones de haute et de basse pression stables qui restent dans une région pendant une période anormalement longue. En 2018, par exemple, des creux très stables se sont étendus sur l’Atlantique Nord et le sud de l’Europe pendant une longue période, cela a entraîné de fortes précipitations dans cette zone et une sécheresse extrême entre les deux, en Europe centrale », a expliqué le météorologue Patric Seifert de TROPOS, chargé de reconstituer, pour l’étude, les situations météorologiques à grande échelle.
En résumé, pour la première fois des chercheurs ont pris en compte cette fraction de l’histoire climatique médiévale et ils en sont arrivés à la conclusion suivante : un système de haute pression solide et stable a prédominé sur l’Europe Centrale, justifiant ainsi l’extrême sécheresse de ces années, entre 1303 et 1307.
De plus, au fil de leurs recherches, ils ont fini par observer une coïncidence entre les périodes de sécheresses et les incendies urbains. Evidemment, aujourd’hui, grâce aux pompiers nous sommes davantage en sécurité face aux incendies, mais au Moyen-Âge cela représentait un immense danger pour les villes aux nombreuses constructions.
« Nous pensons que notre analyse est la première à trouver une corrélation entre les incendies et les sécheresses sur une période de deux cents ans. Les grands incendies urbains suivaient généralement les sécheresses d’un an. Les structures en bois des maisons médiévales ne se dessèchent pas immédiatement. Mais une fois que c’est arrivé, elles s’enflamment très facilement » , explique Martin Bauch, leader du groupe de recherche junior.
Pour la petite histoire, à l’époque contemporaine, les habitants étaient également conscients du lien étroit entre les sécheresses et les risques d’incendie… Ils étaient obligés de placer des seaux d’eau à côté de leurs portes d’entrée en guise d’extincteur.
DATES DE NOS GRANDS ÉTÉS ET GRANDES SÉCHERESSES : |
VIe siècle : 580, 582, 584, 585, 586, 587, 589, 591
* VIIe siècle : 675, 700
* VIIIe siècle : 783
* IXe siècle : 874, 892
* Xe siècle : 921, 987, 994
* XIe siècle : 1078, 1094
* XIIe siècle : 1137, 1183, 1188
* XIIIe siècle : 1204, 1212, 1226, 1287
* XIVe siècle : 1305, 1306, 1325, 1331, 1334, 1361, 1384, 1392
* XVe siècle : 1473
* XVIe siècle : 1540, 1553
* XVIIe siècle : 1632, 1674, 1684, 1694
* XVIIIe siècle : 1701, 1712, 1718, 1719, 1726, 1727, 1767, 1778, 1793
* XIXe siècle : 1803, 1811, 1817, 1825, 1842, 1858, 1875, 1893
Pour aller plus loin :
https://www.france-pittoresque.com/spip.php?article644