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Le Scrutateur.

Blog destiné à commenter l'actualité, politique, économique, culturelle, sportive, etc, dans un esprit de critique philosophique, d'esprit chrétien et français.La collaboration des lecteurs est souhaitée, de même que la courtoisie, et l'esprit de tolérance.

Une contestation de la politique française au Mali, par l'historien Bernard Lugan.

Bernard Lugan.

Bernard Lugan.

Mali : les éthers idéologiques expliquent l’éviction de la France.

 

Le vendredi 18 février 2022, la junte militaire au pouvoir à Bamako a exigé que le départ des forces de « Barkhane » se fasse immédiatement, et non pas par étapes, comme l’avait annoncé le président Macron. Comment en sommes-nous arrivés à une telle situation et à une telle rupture ? 

 

Comme je ne cesse de le dire et de l’écrire depuis des années, notamment dans mon livre Les Guerres du Sahel des origines à nos jours, au Mali, les décideurs français ont additionné les erreurs découlant d’une fausse analyse consistant à voir le conflit à travers le prisme de l’islamisme. Or, ici, l’islamisme est d’abord la surinfection de plaies ethno-raciales millénaires qu’aucune intervention militaire étrangère n’était par définition en mesure de refermer. 

 

De plus, au moment où de plus en plus d’Africains rejettent la démocratie à l’occidentale, la France s’arc-boute tout au contraire sur cette idéologie vue en Afrique comme une forme de néocolonialisme. Plus que jamais, les dirigeants français auraient donc été inspirés de méditer cette profonde réflexion que le Gouverneur général de l’AOF fit en 1953 : « Moins d’élections et plus d’ethnographie, et tout le monde y trouvera son compte »… En un mot, le retour au réel africain et non l’incantation aux idéologies plaquées. 

 

Voilà la grande explication de ce nouvel échec français en Afrique. Sans même parler du refus bétonné de simplement s’interroger sur les arguments de la junte malienne. Immédiatement clouée au pilori par Paris qui ne lui laissa aucune marge de manœuvre, cette dernière fut automatiquement acculée à une fuite en avant maximaliste afin de ne pas perdre la face. Les petits marquis qui font la politique africaine de la France devraient pourtant savoir qu’en Afrique, la priorité des priorités lorsque l’on entre en contentieux, est de ne jamais faire perdre la face à son interlocuteur. Mais cela ne s’apprend pas à Science-Po…

 

 

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C
Nos spécialistes, technocrates et grands hommes d’état auraient bien fait de lire, pour s’informer et s’en inspirer, les grandes lignes de la « nouvelle politique indigène », proposée par le Gouverneur Général Félix Eboué en 1941.<br /> Il prône le respect des traditions, l’appui aux chefs coutumiers, le développement des structures sociales déjà existantes ainsi que l’amélioration des conditions de travail. Il y développe même la vision d’une évangélisation progressive et respectueuse des coutumes.<br /> Mais surtout, au terme de cette circulaire, il rappelle l’indispensable étincelle découverte chez Lyautey pour le guider :<br /> <br /> CHAPITRE VIIl (conclusion)<br /> <br /> Du sentiment qui anima notre politique, Lyautey écrivait d'un résident en Annam : « Il est très intelligent, mais il ne fera jamais rien, parce qu'il lui manque cette parcelle d'amour sans laquelle ne s'accomplit nulle grande œuvre humaine ». <br /> J 'ai cité Lyautey en débutant. et je le cite à nouveau en terminant, mais c'est sa vie entière que je devrais proposer en exemple.<br /> Si Lyautey a réussi au Maroc, c'est parce qu'il a aimé les Marocains. Son travail n'a pas été parfait, et l'organisation du Protectorat a connu ses jours néfastes comme ses jours fastes. Cependant, les indigènes lui ont fait crédit parce qu'il les aimait, et ses insuccès partiels ont été l'objet d'un affectueux oubli,<br /> <br /> Ainsi aimerons-nous les noirs de notre Afrique Equatoriale Française. Nous les avons reçus en dépôt. C'est ce dépôt que nous avons tenu, avec l'honneur de la France, à sauvegarder l'année dernière. Ils sont liés à nous, et nous sommes liés à eux. Tous tant que nous sommes, missionnaires, colons, fonctionnaires, commerçants, dont plus de la moitié de la vie se passe ici, dont presque tous les intérêts sont ici, considérons avec une lucide amitié les indigènes de ce pays. Nous avons arrêté ensemble les règles qui les guideront vers le bien, animons maintenant ces règles de notre amour.<br /> <br /> D'autres colonies sont plus avancées que nous, pour avoir appliqué plus tôt et plus méthodiquement des recettes analogues. Assurons-nous que le résultat final sera pourtant meilleur chez nous, parce que nous connaissons mieux que tous autres le secret de cette parcelle d'amour sans laquelle ne s'accomplit nulle grande œuvre humaine. <br /> Brazzaville, le 8 novembre 1941. F. EBOUE<br /> <br /> <br /> Sans doute ce qu'a oublié notre époque...
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