17 Décembre 2020
J'aurais pu titrer « les derniers coups » d'Emmanuel Macron. A savoir le coup de l'annonce d'un réferendum sur la question climatique, avec le projet d'introduire celle-ci dans la Constitution de le cinquième République. Mais aussi le « coup » de son accueil personnel à la Covid, pour tenter de ralier autour de sa personne malade la sympathie ou la bienveillance.
J'ai en définitive opté pour le singulier. Ma polémique se veut d'abord politique et rationelle. Il y aurait donc de l'excès à suggérer l'infusion volontaire du virus de la Covid.
Donc pas de coup en-dessous de la ceinture. La critique sur le fameux referendum est tout-à-fait valable, comme le démontre l'article suivant de Guillaume Tabard du Figaro. (Le Scrutateur).
CONTRE-POINT - Quel que soit le résultat, cette initiative sera forcément gagnante pour Emmanuel Macron.
Coup de bluff ou coup de poker ? Le référendum annoncé pation, bien sûr ? Mais il y a une question préalable : ce référendum aura-t-il lieu ?
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Le chef de l'État l'a bien dit aux membres de la Convention citoyenne pour le climat. Même soumise au vote des Français, une révision constitutionnelle doit d'abord être votée en termes identiques par les deux assemblées. Disons-le sans détour : il faut que le Sénat, où l'opposition est majoritaire fasse au président ce « cadeau » qui permettra au président de la République de frapper un coup spectaculaire destiné à la fois à refermer la longue séquence de la crise sanitaire et à lancer la prochaine campagne présidentielle.
Quoi qu'il en soit, cette étape sera gagnante pour Emmanuel Macron. Soit en effet, il obtient un vote conforme, et il pourra se présenter comme celui qui lance un processus d'envergure au nom de la transition écologique ; mais aussi comme celui qui aura réussi à susciter une forme de consensus politique. Soit l'opposition dénonce une manœuvre tactique et bloque la révision constitutionnelle, et alors il se posera en seul tenant du sérieux environnemental et pointera du doigt cette attitude«politicienne» qui sacrifie le climat sur l'autel de ses petits calculs. Bref, s'il franchit l'étape parlementaire, ce sera grâce à lui ; s'il échoue, ce sera la faute aux autres. Là, réside la part de bluff .
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Face aux plus combatifs de la cause environnementale, Macron était suspect ; accusé de ne pas mesurer l'ampleur de l'enjeu ou de ne pas oser aller au bout de ce qui serait nécessaire à leurs yeux. Avec la simple annonce de référendum, dont les conséquences, si la Constitution est effectivement révisée, seront contraignantes sur l'ensemble des législations à venir, il fait tomber cette critique-là. Et redevient audible auprès d'un électorat écologiste qui, de la démission de Nicolas Hulot aux incompréhensions sur l'issue de la Convention citoyenne, ne lui faisait plus crédit sur ce terrain.
Si un vote du Parlement était acquis, le plus dur resterait à faire : obtenir une majorité de oui auprès des Français. À quelques heures de cette annonce, les plus proches ne semblaient pas dans la confidence. Un des poids lourds les plus écoutés de la Macronie confiait avec causticité: « un référendum ? Il ne doit le faire que s'il veut être sûr de le perdre ». Au nom de ce qui semble être une loi d'airain électorale : on ne répond jamais à la question posée, mais toujours à celui qui la pose. Ce qui reste à démontrer. En 1969, les Français ont clairement signifié son congé à de Gaulle, se moquant comme d'une guigne de la régionalisation. En 2000, ils ont dit oui au quinquennat alors que Jacques Chirac n'était pas au sommet de sa forme. Et en 2005, leur non massif valait à la fois désaveu de Chirac et rejet de la Constitution européenne proposée. Autrement dit les deux entrent en ligne de compte. Et c'est là que réside le pari de Macron. Le chef de l'État sait que l'exigence de la population est désormais forte en matière d'environnement et qu'un même électeur peut vouloir le chasser de l'Élysée en 2022 tout en défendant la priorité écologique en 2021.
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L'exercice n'en est pas moins risqué dans la mesure où personne, à commencer par le président, ne sait quel sera le moral profond des Français à la rentrée prochaine, échéance plausible d'un référendum. S'ils lui font crédit de sa gestion de la crise et si sa popularité reste à son niveau actuel, il peut espérer éviter un vote sanction. Mais si les dégâts économiques, sociaux et psychologiques sont pires que redoutés, qui sait jusqu'où irait la contestation populaire.
À tout le moins, le risque est grand. Et sans doute cela a-t-il joué dans le choix présidentiel qui est un choix éminemment personnel. Il y a un côté joueur de poker chez Macron. D'autant qu'il a compris que le plus grand risque pour lui d'ici à 2022 était de ne pas en prendre.