7 Septembre 2018
Un an de prison avec sursis a été requis contre deux divinités dont le moins qu'on puisse dire est que leur passage n'est pas passé inaperçu à Orly Ouest. Les apparitions de Lourdes ou de Fatima ne sont rien à côté. Un an de prison avec sursis, autrement dit rien du tout. Ou bien la presse ne fait pas son travail d'information, ou bien aucune amende n'a été requise contre ces deux incarnations. Comme quoi le principe de laïcité n'est qu'une théorie toute théorique, puisque la République honore et protège les divinités ainsi que le culte qui leur est dû. Il est vrai que les dieux ne sont redevables de rien devant la justice des hommes, et que les présumés juges sont là pour appliquer la loi. On dirait même, devant pareils moments d'extase mystique, que non seulement la loi divine est de retour, mais que se dessine là une véritable apogée du droit positif.
On frémit à l'idée de la sanction qui se serait abattue sur tout contrevenant susceptible d'émettre un commentaire profane, qui eût été de facto sacrilège. Le malheureux eût été roué en place publique. À l'heure des laudes, (
partie de l'office divin qui se chante à l'aurore après matines, et qui est principalement composée de psaumes à la louange du Seigneur.) |
c'est la louange, qui est de rigueur. Quant aux milliers d'euros de dégâts qui seraient survenus à l'occasion de leur apparition, ce n'est que juste offrande. Et l'effroi semé parmi les gens civilisés qui ont assisté à cette scène d'horreur ? Il faut l'interpréter comme un moment de communion, une sorte de transe mystique sous les grandes eaux de la cascade de Saut d'Eau.
Les fidèles éblouis réclament de nouvelles rapousies - l'équivalent de la parousie dans la culture plurielle - dans tous les lieux publics. Et pourquoi pas, l'année prochaine, le jour de la Fête de la musique, dans la Cour d'honneur de l'Élysée. Là, comme disent les Écritures, les temps seraient accomplis. Et comme dirait quelqu'un qui, en matière de République, prétendait s'y connaître (et qui fut plus ou moins l'inventeur du totalitarisme) : tant que les philosophes ne seront pas rois dans les cités, ceux qu'on appelle aujourd'hui rois et souverains ne seront pas vraiment philosophes... il n'y aura de cesse aux maux des cités. L'oncle Eusèbe certifie de son côté que maintenant que les présumés juges sont grands prêtres et que la laïcité est devenue une paroisse comme une autre de l'église mondiale universelle, les maux des cités sont devenus les bienfaits de la cité. Il y a cependant de fortes probabilités - de fortes chances,même - pour que l'on assiste aux funérailles de la civilisation euro-chrétienne, c'est sûr. Comme celles de Victor Hugo ou d'Aristide Boucicaut, elles seront à n'en pas douter grandioses. Plus encore que celles de Johnny, idole des jeunes qui ont vieilli et du business qui veille au grain. Les grands prêtres seront là pour les célébrer dans le respect de tous les rites conformes aux exigences rituelle de la purification telles que les prescrivent les divinités elles-mêmes.
Comme diraient Edidnac et Jack Lang, il faut jardiner sa culture : que les dieux continuent à éclairer la cité, que tous ceux qui ont péché contre le sans-gêne fassent repentance du crime de lèse-divinité dont ils sont forcément coupables (et que la laïcité a trop longtemps couvert de son indifférence avant de trouver pour le salut de la République le chemin de la Lumière), et tout ira encore mieux dans un monde devenu infiniment meilleur.
Allez savoir pourquoi, le diable rit.