23 Mai 2018
( Demeurons prudents. Le titre du Figaro ne le dit pas, mais l'expérience politique y incite. Et si le charisme du jeune Macron conduisait à une durable pacification des passions dans la Calédonie française, il faudrait s'en féliciter. LS. ).
_________________________________
INFOGRAPHIE - «Le Caillou» doit voter le 4 novembre prochain pour dire s'il reste dans la République.
De notre envoyée spéciale en Nouvelle-Calédonie
Trois semaines après sa venue, l'effet Macron se fait toujours sentir sur le Caillou. Alors que la Nouvelle-Calédonie s'apprête à entrer en campagne pour le référendum du 4 novembre, les élus de tous partis continuent de se réjouir des mots tenus par Emmanuel Macron le 5 mai, au point que loyalistes et indépendantistes s'y retrouvent. «Le président a donc réussi à contenter tout le monde… à moins qu'il enfume chacun d'entre nous», indique un Calédonien.
Le sénateur Pierre Frogier, leader du Rassemblement Les Républicains, et qui siège au groupe LR au Sénat, fut le seul parlementaire élu reçu par le président 15 jours avant sa venue en Nouvelle-Calédonie. «Ne nous compliquez pas la tâche», l'avait conjuré Pierre Frogier en rencontrant le chef de l'État qui l'avait aussi mis en garde contre une nouvelle utilisation de l'expression de «peuple calédonien» utilisée quelques mois plus tôt par le premier ministre. «C'était inadmissible», poursuit le sénateur, qui se dit «satisfait» après le passage du chef de l'État. «Emmanuel Macron a affirmé que la France sans la Nouvelle-Calédonie ne serait plus la France et il a affirmé cette vision stratégique du XXIe siècle. Ce discours est très satisfaisant», se réjouit le leader du Rassemblement les Républicains. À droite toujours, Sonia Backès, présidente de Républicains Calédoniens, semble avoir été très séduite. Sur son compte Facebook, l'élue avait ainsi écrit: «Magnifique discours du président de la République. “La France serait moins belle sans la Nouvelle-Calédonie.” Et en partant, un message personnel en me disant au revoir: “Maintenant je compte sur vous.”»
À l'autre bout de l'échiquier politique, la satisfaction… est la même. «Emmanuel Macron a exposé des valeurs et un projet que nous portons depuis longtemps», détaille Nina Julié, de Calédonie Ensemble et membre du Congrès. «Il y a ce qu'il dit et aussi son équation personnelle», s'enflamme l'élue, qui a retenu, pour sa part, le passage sur « la souveraineté dans la souveraineté». «Nous retrouverons le concept de petite nation dans la grande que nous portons. Tout au long de sa visite en Nouvelle-Calédonie, le président a porté des valeurs et un projet qui convergent avec les positions qui sont les nôtres.» Comme une dizaine de personnalités de Calédonie Ensemble, Nina Julié a donc rejoint LaREM au niveau national dans la foulée du passage d'Emmanuel Macron.
«Je veux bien croire au talent d'Emmanuel Macron, mais là, j'entends qu'il a ensorcelé les élus!» lance mi-figue, mi-raisin, Harold Marin, ancien président du gouvernement local. «Non, moi, il ne m'a pas ensorcelé!» réplique Bruno Retailleau, président du groupe LR au Sénat, venu en Nouvelle-Calédonie accompagné de deux sénateurs LR, Sophie Primas et Mathieu Darnaud. «Je voudrais bien savoir ce qu'il a promis aux indépendantistes pour qu'ils soient aussi calmes», réfléchit Harold Marin. «Tous ceux qui faisaient campagne pour Marine Le Pen sont tombés d'accord. Il fait du théâtre, le président», dit-il.
«Emmanuel Macron, il n'a pas son pareil pour adresser à chaque interlocuteur le message qu'il souhaite entendre. Il le fait avec talent. C'est la pensée macronienne»
Bruno Retailleau, président du groupe LR au Sénat
Un constat partagé par Thierry Santa. «Quand j'ai vu le programme d'Emmanuel Macron, avec la visite du Sénat coutumier, de la province Nord, le rendu de l'acte de possession, je me suis inquiété et demandé ce qu'il venait faire», résume le président du congrès et membre du Rassemblement Les Républicains. «Mais s'il y a quelque positif à retenir de cette visite, c'est qu'il a apaisé tout le monde. Ça nous touche et ça nous plaît, mais il a aussi satisfait le discours indépendantiste. C'est comme d'habitude… C'est le “en même temps”», fait valoir Thierry Santa.
Au point que certains élus y ont vu une grosse ficelle. «Emmanuel Macron, il n'a pas son pareil pour adresser à chaque interlocuteur le message qu'il souhaite entendre. Il le fait avec talent. C'est la pensée macronienne», complète Bruno Retailleau. «Il a exprimé une préférence dans son discours, mais il l'a fait trop timidement», regrette le président du groupe LR, bien décidé à ne pas laisser tout l'espace à Emmanuel Macron dans l'île. «LR s'occupe de la Nouvelle-Calédonie!» lance-t-il à ses interlocuteurs. À la rentrée 2018, deux mois avant le référendum, ce sera au tour de Laurent Wauquiez d'effectuer le déplacement.