22 Avril 2016
1 ) Petit regard de biais d'Emmanuel en direction de François. 2 ) Version nouvelle du Huis clos de Sartre. Les visages des deux larrons en disent plus long que d'épais in folio.
La coqueluche était, au temps de mon enfance ( comme dit la chanson de route « c'était au temps d'la préhistoire, il y a deux ou trois cents mille ans... » ) une maladie plutôt classée parmi les maladies infantiles ( une de celles auxquelles j'ai échappé, par miracle ). On la définit comme une maladie contagieuse, caractérisée notamment par une toux convulsive pouvant entraîner un étouffement.
Un autre sens lui confère cette autre définition : « le fait pour quelqu'un d'être à la mode, de faire l'objet de toutes les conversations … de façon tout autant convulsive ou compulsive qu'au sens n° un.
Or, chers amis, depuis quelques jours je tousse, et cependant j'ai dit adieu aux maladies infantiles.
Pourtant, pourtant, je tousse. Mes petites nièces, et mon petit neveu m'interrogent « Dis tonton, pourquoi tu tousses »? Comme ils n'ont pas connu l'époque de François Mitterrand, je leur pardonne ces petites inadvertances de langage, difficilement compatibles avec le respect dû aux anciens de la tribu.
Mais d'où me vient cette toux? Le fait est qu'elle survient souvent aux heures des bulletins d'information radio et TV, et plus spécialement, depuis une semaine quand il est question, et c'est souvent, d'Emmanuel Macron.
C'est lui la coqueluche nouvelle des journalistes, et du public selon les journalistes. Un homme jeune, beau, ayant fait de grandes études, ayant bossé dans le privé ( la Banque ! ) et ministre, ….... aahhh! Et voici notre sauveur! Disent les Français tout prêts à chanter sur un air connu « Emmanuel, nous voilà » comme il y a 76 ans.
Et là, que voulez-vous, moi je tousse, de la toux du sceptique non point radical qui ne croit en rien, variété de François Hollande ) mais du sceptique méthodique, celui qui veut bien croire mais qui veut qu'on lui montre, qu'on lui prouve, comme St-Thomas Didyme, vous savez l'apôtre de bonne volonté qui demandait à voir le Christ ressuscité et qu'on pourrait instituer « père de la méthode expérimentale dans les sciences ».
Oui, Scrutateur Didyme demande des preuves.
Par exemple comment ce jeune espoir de...la gauche ( tiens, tiens ! ) ministre d'un gouvernement de gauche qui échoue dans tout ce qu'il entreprend est-il devenu un espoir, un supposé sauveur?
Remarquez que je voudrais bien moi qu'il comble les attentes de tant et tant de gens, mais....
Or voici que j'entends tousser dans la pièce à côté, je me lève, j'entrouvre la porte et je vois mon collègue du Figaro Serge Federbuch, qui finit sa Tribune qu'il me fait lire, et que je publie avec son accord.
Et voici que, nous ayant lu l'un et l'autre, nous ne toussons plus, que nous nous congratulons, libérés de tout flux oppressant.
Lisez, amis, lisez Le Scrutateur, lisez Le Figaro, contre les coqueluches de toutes sortes, et les encombrements nasals, c'est bien mieux que du Physiomer.
Le Scrutateur.
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Serge Federbusch
http://kiosque.lefigaro.fr/ouvrir-liseuse-milibris/le-figaro/03772ed4-bf96-4769-81a9-5202dd35b892
Le dieu Sondage a parlé : Emmanuel Macron est le seul à « gauche » à pouvoir qualifier son camp au second tour de la présidentielle. Les socialistes désespérés, députés à la dérive et autres conseillers de cabinets ministériels aux abois tiendraient-ils enfin leur sauveur ? Face à Marine Le Pen et peut-être même à Nicolas Sarkozy, tout pourrait alors continuer comme avant. Confronté à Alain Juppé, l’issue du duel serait plus incertaine mais, comme il n’y a entre eux qu’une différence d’ancienneté à l’Inspection des finances, ce ne serait pas grave. L’oligarchie serait épargnée.
Il faut dire qu’il a le profil avantageux, Emmanuel. Sorte d’hybride de Valéry Giscard d’Estaing, de JJSS (les jeunes générations chercheront grâce à Google ce que signifie ce sigle étrange), de Jean Lecanuet et autres ébauches de John Kennedy à la française ; moderne, centriste, réformateur, audacieux, ni franchement de gauche ni carrément à droite : le parfait équilibre. Un produit merveilleusement calibré par Jacques Attali et les hebdomadaires sur papier glacé pour administrer avec le sourire les potions amères que les Français recrachent avec une belle régularité depuis des années. En fait de storytelling, on ne peut rêver mieux que l’actuel ministre de l’Économie. La dramaturgie électorale a besoin de surprise, d’inattendu, qu’on renverse la table. Ici, ce renversement serait tout ce qu’il y a plus symbolique. Il faut que tout change avec Macron pour que rien ne change.
Hélas ! Cette jolie figurine est promise à un jaunissement accéléré. Tout d’abord, le dieu Sondage est énigmatique. À y regarder de près, les scores de Macron ne seraient élevés que s’il n’était pas confronté à un autre candidat adoubé par le PS, issu d’une primaire ou auto-proclamé lui aussi. Faites entrer Hollande, Montebourg, Hamon ou même Lienemann dans la danse et vous ne trouverez plus qu’une gauche émiettée, pulvérisée façon puzzle, renvoyée à son score de 1969 quand Pompidou fit la course tout seul face à Poher au second tour. Macron ne serait alors que l’étincelle qui aura provoqué l’explosion du socialisme bureaucratique de gouvernement.
Ensuite, Macron devra, s’il se lance dans l’aventure, dire à un moment ou à un autre ce qu’il a en tête, en matière de politique économique et sociale notamment. Et c’est là que les macroniens se macroniseront. Car cet Emmanuel fougueux et iconoclaste est en réalité respectueux d’une grande partie des choix qui plombent la France. Entend-il renégocier le fonctionnement désastreux de l’Union monétaire maastrichienne ? Non. Il ferait comme tous les préposés de Bruxelles et Francfort : il adhérerait à une politique de change qui nous handicape en échange d’un endettement monétisé par Mario Draghi. Le couple infernal qui nous ruine, la désindustrialisation et la dette, continuerait de prospérer joyeusement.
Engoncé dans ce corset monétaire, il lui faudrait être particulièrement féroce en matière d’ajustement structurel, c’est-à-dire de compression des coûts salariaux et des dépenses publiques, ce qu’il évite naturellement de trop évoquer pour n’inquiéter personne. Il ne s’agit pas pour moi, libéral, de nier la nécessité urgente de s’attaquer au mastodonte étatique, bien au contraire. Mais le faire avec le boulet européen qui nous entrave depuis des décennies conduirait vite Macron, à défaut de résultats, à une crise sociale de première ampleur, ce que tous les pouvoirs depuis quarante ans ont pris la précaution d’éviter.
Du reste, comme il lui serait très difficile de gagner les législatives avec une majorité présidentielle bricolée in extremis à sa dévotion, il aurait à affronter concomitamment une paralysie institutionnelle. Son équation politique est donc singulièrement compliquée.
Car il ne faut pas oublier que hormis quelques articles bienveillants dans la presse people et des patrons attendris, Macron n’a ni parti ni troupes. Les aventures individuelles n’ont jamais fonctionné en France depuis Napoléon III, celle de De Gaulle en 1940 étant partagée par d’autres résistants et portée par des circonstances tragiques. On ne fait pas d’un haut fonctionnaire bien-pensant un chef rebelle grâce à Paris Match.
Enfin, sur les autres sujets qui fâchent les Français et empoisonnent le débat public, en particulier celui de l’islam et de la laïcité, Macron se dissimule derrière des formules incantatoires sur les ghettos et la responsabilité de l’homme blanc, ignorant comme beaucoup la triste réalité d’un fondamentalisme religieux qui est loin de ne se nourrir que de misère. Certains des pays musulmans qui se sont le plus développés économiquement depuis cinquante ans comme l’Iran, la Turquie ou l’Arabie, par des moyens du reste variables, ont connu la pire réaction islamiste. Cela ne cadre aucunement avec le schéma conformiste que Macron reprend pour éviter de trop y réfléchir. Bref, la surprise Macron est un produit politique en voie de péremption avant même sa sortie d’emballage.
Reste une dernière hypothèse, un ultime rêve du think-tank de gauche Terra Nova : un ticket Juppé-Macron. Ce serait l’apothéose transpartisane, un homme politique nouveau comme les transhumanistes nous annoncent un humain renouvelé par la science. Ce scénario censément libéral-libertaire n’est guère plus convaincant que le précédent, parce que les deux candidats entendent occuper le même terrain. Si Macron renonçait pour se rallier à Juppé, nul doute que ce dernier le remercierait d’une poignée de main, d’un sourire puis d’un coup de pied bien placé sitôt l’élection terminée. L’un n’a rien à apporter à l’autre.
L’effet Macron fera donc probablement long feu. C’est dommage, non pour ce qu’il est mais parce qu’il s’agira à nouveau d’une démonstration que, dans la Ve République cacochyme, aucune force neuve ne peut surgir en respectant les règles institutionnelles. L’hyperprésidentialisation du régime, loin de permettre les réformes, joue désormais au bénéfice de l’immobilisme. Emmanuel Macron ne sera rien d’autre qu’une énième illusion qui se fracassera sur cette réalité.
* Ancien élève de l’École nationale d’administration. Président du Parti des libertés et animateur du site d’information satirique Delanopolis. Auteur, notamment, de « Français, prêts pour votre prochaine révolution ? » (Ixelles Éditions, 2014).
SERGE FEDERBUSCH