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11 Février 2016
EMPLOI ET POLITIQUES SOCIALES
11 février 2016 • Christian Arnault • Sandrine Gorreri
Pour la première fois, la Fondation iFRAP présente le classement de l'absentéisme dans les hopitaux de France à la suite de l'analyse des bilans sociaux des centres hospitaliers universitaires pour l’année 2013 (dernières données récupérables) :
Le podium des mauvais élèves en matière d'absentéisme est composé du CHU de Lille (30,99 jours toutes causes), du CHU de Rouen (30,94 jours toutes causes) et du CHU d'Amiens (29,37 jours toutes causes).
Le podium des "bons" élèves est, lui, composé du CHU de Limoges (21,35 jours toutes causes), du CHU de Caen (21,69 jours toutes causes) et du CHU de Nîmes (22,49 jours toutes causes).
Les données présentées dans la feuille de calcul sont le résultat de la mise en forme des données des bilans sociaux des centres hospitaliers universitaires pour l’année 2013.
Le bilan social : L’instruction n°DGOS/RH3/DGCS/4B/2013/15 du 2 janvier 2013 établit les règles relatives à l’élaboration du bilan social dans les établissements de santé. Le nouveau bilan social doit présenter un socle minimal d’indicateurs. Dans tous les bilans sociaux, les effectifs en ETPR sont exprimés pour le personnel médical et le personnel non médical (qui comprend le personnel soignant : infirmières, sages-femmes, aides soignants, kinés, personnel de rééducation, etc.). En ce qui concerne le personnel non médical il n’y a pas toujours la ventilation permettant d’isoler le personnel soignant. Il y a aussi des indicateurs qui permettent d’isoler le type de contrat (CDI, CDD, …..) le genre, les catégories A, B, C ainsi que l’âge moyen. Les autres indicateurs traitent de la masse salariale et de son évolution et de l’emploi des personnels intérimaires, des Compte Epargne Temps. L’indicateur 6, lui, traite le taux d’absentéisme sous forme de tableau avec une précision sur les motifs :
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Remarques sur notre étude
L’aide au remplissage sur le calcul des indicateurs mentionne la technique suivante en ce qui concerne le personnel :
Effectif Equivalent Temps Plein : un agent à 80% est compté comme 0.80 ETP. Ce même agent à 80% est compté pour 1 en effectif physique. Pour le personnel médical, les personnels hospitalo-universitaires sont comptés pour 0.50 ETP, et un praticien hospitalier à temps partiel est compté 0.60 ETP.
Effectif Equivalent Temps Plein Rémunéré (ETPR) : un agent à 80% sera compté 0.86% car c’est le coût qu’il représentera pour la structure.
Dans la majorité des bilans sociaux analysés, les effectifs en équivalent temps plein, effectifs physiques moyens ne sont pas toujours documentés. Nous avons retenu les effectifs exprimés en ETPR afin de pouvoir comparer les différents CHU. Ce choix peut entrainer une légère augmentation des résultats car l’ETPR est toujours inférieur aux autres valeurs lorsque spécifiées. Pour mémoire, ces données ne comptabilisent pas les autorisations d’absence type enfants malades, ancienneté, etc.
L’analyse des bilans sociaux publiée par l’ATIH (Agence Technique de l’Information sur l’Hospitalisation), en janvier 2014 (portant sur les données 2012) donne sur les 188 établissements ayant renseigné leur taux d’absentéisme les valeurs suivantes :
Personnel Médical : 2,8 % et le Personnel Non Médical : 7,4 %
Personnel Médical : 8 jours et le Personnel Non Médical : 25,5 jours
Notre étude portant sur 30 centres hospitaliers universitaires (CHU) donne des résultats très similaires malgré les reconstitutions de données en fonction des éléments manquants. Ainsi, les absences toutes causes dans les 30 CHU sont :
Données exprimées en pourcentage : personnel médical, 3,12% et personnel non médical, 7,48%.
Données exprimées en jours : personnel médical, 11,38 jours et personnel non médical, 27,29 jours.
Les absences hors parentalité dans les 30 CHU sont :
Données exprimées en pourcentage : personnel médical, 1,58% et personnel non médical, 4,58%.
Données exprimées en jours : personnel médical, 5,81 jours et personnel non médical, 16,71 jours.
Dans les 5 établissements de plus de 10 000 agents sont :
Données exprimées en pourcentage : personnel médical, 3.61% et personnel non médical, 7,96%.
Données exprimées en jours : personnel médical, 13,17 jours et personnel non médical, 29,05 jours.
La Fondation iFRAP a pu se procurer les chiffres concernant les cliniques issus d’un dépouillement effectué par la Fédération hospitalière privée (FHP) présentés ci-dessous. Ils concernent les absences en jours (en trentième) des salariés en CDI du 1er janvier au 31 décembre 2014 figurant dans le rapport de branche pour 2014, renseignés par près de 50 % des cliniques et hôpitaux privés adhérents.
Si on totalise les périodes d’arrêts comptabilisées habituellement pour l’absentéisme (maladie, accident du travail, maladie professionnelle et maternité), on trouve au total 1.009.913 + 158.279 + 18.918 + 308.806 = 1.495.916 jours d’absences pour les salariés en CDI. Le nombre de salariés en CDI des entreprises ayant répondu au rapport de branche est de 61.344 salariés, soit un ratio moyen de 1.495.916 / 61.344 = 24,4 jours d’absence par salarié et par an. Cela produit un taux d’absentéisme moyen de 24,4 / 365 = 6,7 %.
Ventilation des salariés par filière :
On constate donc qu’il n’y pas a priori de différence sur l’absentéisme toutes causes qui se situe pour l’ensemble du personnel à 24,4 jours pour l’hospitalisation privée contre 26,27 jours dans les hôpitaux publics de notre échantillon et à 19,4 jours hors parentalité pour l’hospitalisation privée contre 20,47 pour les hôpitaux publics.
S’agissant du personnel médical, on constate une forte féminisation qui entraîne un absentéisme pour congés maternité, phénomène d’autant plus visible à l’hôpital public où les médecins sont salariés (ce qui ne se voit pas dans les statistiques FHP où les médecins exercent souvent en libéral).
On constate un vieillissement de la population soignante (infirmières, agents de services hospitaliers,…) qui induit une aggravation de l’absentéisme pour CLM/CLD et AT/MP. Ces phénomènes se retrouvent à la fois dans l’hospitalisation publique et privée.
Le personnel non médical ne recouvre pas seulement le personnel soignant mais aussi le personnel dit logistique et technique (ex : brancardiers, ambulanciers, électriciens,…), exposé aux absences Cette fonction a été en partie externalisée (notamment pour les missions de bionettoyage) d’où la convergence entamée des taux d’absentéisme public/privé.
Faute d’information détaillée, nous ne pouvons que comparer au taux d’absentéisme global livré pour l’AP-HP : on y constate que toutes catégories confondues, c’est bien dans la filière « soignant » et dans la filière « ouvrier et technique » que les taux d’absentéisme sont les plus élevés. Le taux d’absentéisme global pour 2014 s’établit à 8,52% (motif médical et non-médical) à rapprocher d’un taux d’absentéisme moyen pour les hôpitaux publics de notre échantillon de 7,13% (toutes causes, ensemble du personnel).
Taux d'absentéisme pour motif médical et non médical
Calcul = nombre de jours d'basence x quotité (hors congés, RTT, jours fériés, repos hebdo. et hors absences pour formation et autres autorisations d'absences) / (ETP moyen n x 365).
Il est nécessaire d'avoir une réflexion par catégories d'absentéisme :
Pour 20 % l'absentéisme est liée à la parentalité ce qui s'explique par la part élevée de personnel féminin (73%)
Pour 30% il s'agit d'absentéisme longue maladie/longue durée ou accident du travail/maladie professionnelle
Enfin il reste 50% de maladie ordinaire et sur cette part que repose la marge de manoeuvre des établissements
L'enjeu est donc de tout mettre en place pour que l'absentéisme pour maladie ordinaire celui qui a un fort impact sur l'organiation du travail soit limité.
Pour cela, il est indispensable de revenir sur la suppression du jour de carence : la FHF s'est insurgée en son temps du retrait de cette mesure qui en un an avait permis de faire économiser près de 90 millions d'euros
Les employeurs publics se plaignent également de l'absentéisme de courte durée comme symptôme du désengagement des agents. Regrettant l'absence d'outils de reconnaissance individuelle de la valeur professionnelle des agents, la fonction publique hsopitalière fonctionnant toujours à la notation, c'est-à-dire à l'ancienneté, les DRH constatent un certain découragement.
Lors du mouvement de grève à l‘AP-HP l’été dernier, Martin Hirsch expliquait : « Je ne veux pas un hôpital sans RTT ». « Mais aujourd'hui, ces jours s'accumulent dans des comptes épargne-temps (CET), ils ne peuvent pas être pris ou bien ils nous conduisent à prendre des intérimaires. Le vrai sujet, c'est que l'hôpital est passé aux 35 heures sans changer son organisation. On a gardé les mêmes horaires en se disant qu'on verrait bien… Cela a tenu dix ans, cela ne tient plus du tout. Du coup, on traite les problèmes avec quinze ans de retard et de rancœurs accumulées. » En effet, l’organisation du temps de travail est figée depuis 2002, alors que les prises en charge ont évolué et que, par nature, l’hôpital a besoin de souplesse dans son organisation. De fait, les professionnels subissent une grande variabilité dans leur planning, source d’insatisfaction et d’usure, et ne peuvent prendre leurs RTT qui viennent alimenter soit des CET, soit des comptes d’heures dues (dette sociale). Ainsi les questions d’absentéisme, d’organisation et de temps de travail, de RTT et de CET sont très liées à l'hôpital public.