5 Décembre 2015
"Comme je suis mignon, voyez mon sourire juvénile, mes jolies lunettes. Comme je suis dans le coup, avec l'Autre, et contre ceux qui Le rejettent. Comme j'aime l'Autre François, le PS, et comme je m'aime". Mgr Ulrich.
Chacun le sait, il est plus facile d'aimer l'Autre que l'autre. L'Autre, majusculaire, c'est l'abstraction, le Pauvre, l'Etranger, le Migrant, sur lesquels je peux parler, parler, parler, sans conséquences autres que mon autosatisfaction "d'humaniste".
Minusculairement, si j'ose dire, l'autre, c'est mon voisin de palier dont j'ignore l'existence ( sauf peut-être s'il fait du tapage nocturne ), c'est le malade qui implore mon aide, mais qui sent mauvais, et qui est « si exigeant », c'est la vieille grand mère qui arrête pas de vibrer dans dans son mouroir, et qui sert plus à rien, et qui me donne mauvaise conscience de pas aller la voir, c'est le p'tit gars qui vous interpelle au feu rouge, vous demande un euro, et qui lorsque vous lui en avez donné deux ( car vous n'aviez pas la pièce adéquate! ), vous dit en sautillant sur place d'une voix avinée « t'en a pas deux autres, c'est pour manger, j'ai faim !» ce qui suscite votre ire méprisante.
L'Autre, majusculaire, c'est souvent, avouons-le, sujet de prêche. Lisons, écoutons...BHL. Ce n'est pas le prochain, c'est le lointain, sujet par excellence de notre onanisme psychologique, de notre amour de soi, et qui ne nous gène pas.
Comment n'y pas penser en lisant le prêche de Mgr Ulrich, évêque de Lille et d'Aubry, pourfendant le Front National, dans une langue de buis parfaite ( Le dictionnaire Robert nous dit du buis «
Arbuste à petites feuilles persistantes (Buxacées), souvent employé en bordures dans les jardins. | Buis bénit : branche de buis qu'on bénit le jour des Rameaux », en bref les rameaux de nôtre dimanche des rameaux aux Antilles, non encore victime, cela ne saurait tarder, de l'ostracisme de M. Barouin ) », tout le mal qu'il faut penser du Front National, et les conséquences électorales qu'il faut en tirer. ) |
Entendons nous, cet évêque, et chacun d'entre nous, est libre de penser ce qu'il veut du FN, et d'en tirer les conséquences. Mais de la façon dont procède Mgr Ulrich, que nenni! On sait que je n'aime pas les hypocrites qui abusent de leurs titres pour emberlificoter les consciences, et le cas que je fais de ces gens qui, s'identifiant au bon Samaritain de l'Evangile, rejettent ceux qui divergent de leur position personnelle dans les ténèbres extérieures, là où il y a des pleurs et des grincements de dents.
François Teutsch, dans Boulevard Voltaire, remonte les bretelles au suave Ulrich.
Je livre son propos à votre méditation.
Le Scrutateur.
Après La Voix du Nord, Mgr Ulrich ?
Notre pays est riche de talents : intellectuels, littéraires, scientifiques ; il porte en son sein une certaine forme de génie que la bêtise des temps ne dissimule qu’à ceux qui préfèrent les idées toutes faites aux délices de la réflexion. Mais le talent procède aussi de la virtuosité, de l’art, de la capacité à débattre, à s’adapter à notre époque et même parfois de renier sans en avoir l’air tout ce qui fonde notre société à l’aide d’un outil redoutable : la langue de bois.
Pratiquer la langue de bois consiste à tenir un discours qui ne reflète ni la réalité, ni la réflexion, mais qui est au contraire construit à l’aide d’éléments de langage, d’idées toutes faites, de phrases creuses réutilisables à l’envi. Si nos politiciens sont passés maître dans cet art difficile, la palme revient à certains clercs pour qui le terme se décline plutôt en langue de buis. Il suffit de les interroger sur des sujets aussi variés que la solidarité, l’immigration, la pastorale des divorcés, la COP 21 ou la faim dans le monde pour qu’ils dévoilent leur aisance en xyloglossie.
Un exemple ? « Comment aujourd’hui investir la prise de parole structurelle des jeunes des quartiers populaires, sans compter sur une foi des partenaires de la cité? » Vous avez compris ? Moi non plus.
Le meilleur se trouve toujours dans la rencontre entre un homme et un thème. Pour l’homme on choisira un évêque de la génération ’70, encore nombreux sur le marché ; pour le thème : le vote Front National. Cela nous donne une époustouflante démonstration xyloglossique par Mgr Laurent Ulrich, évêque de Lille, interrogé par La Croix le 3 décembre dernier. Le thème est annoncé par le titre : « On ne peut être catholique, c’est-à-dire universel, et xénophobe ». Que répondre à une telle évidence ? Si c’est pour enfoncer des portes ouvertes, autant s’abstenir. Mais bien sûr, chacun l’aura compris, cette parole épiscopale n’est pas lancée pour rien.
Alors notre clerc se lance, avec une curieuse définition du rôle de l’Église : celui « d’instruire les consciences, de donner des repères pour l’analyse politique : le souci des humbles, le respect de la vie et la dignité de la personne humaine, les politiques sociales et familiales et l’éducation des jeunes, le dialogue avec tous les courants de pensée, la paix en Europe, le refus de la violence verbale… » Naïvement je croyais que l’Église avait pour premier rôle le salut des âmes. « Autant de critères essentiels pour le bien commun, qui se combinent en tenant compte des contraintes. » : jolie phrase en langue de bois. « […] Il est clair que tous les partis ont des progrès à faire sur tous ces critères. Mais il y a un critère incontournable qui est l’accueil de l’autre. »
Donc, si l’on en croit Mgr Ulrich, un parti n’est fréquentable que s’il accueille l’autre. Le sont les partis qui soutiennent l’avortement (en matière d’accueil de l’autre on trouve mieux), le mariage homo, la fabrication d’enfants à partir de cellules d’origines diverses, la dictature scolaire, le libéralisme destructeur d’emplois, le rejet des structures naturelles, etc. En bref tous les partis à un degré plus ou moins fort. L’important c’est l’accueil de l’autre. Et l’autre, ce n’est pas le clochard en bas de la rue, ruiné par les délocalisations (vous savez, le grand souffle de la mondialisation qui nous ouvre sur le monde), ce n’est pas le chrétien persécuté en Irak, ce n’est pas le paumé qui cherche un chemin vers le salut. Non, c’est l’immigré, encore, seulement et exclusivement…
Le drame c’est qu’il existe des vraies raisons d’hésiter à voter FN. Comme pour d’autres partis d’ailleurs. Mais la langue de buis ne supporte pas le débat. Elle incarne une vérité immuable, sans nuances.
Bossuet, au secours, ils sont devenus fous !