10 Décembre 2015
Laissons, ce soir ( enfin presque ) le déroulement de l'exaspérante campagne électorale en cours, tant en Guadeloupe et Martinique qu'en métropole.
Je dis « enfin presque », car l'actualité politique se nourrit encore d'un passé, où la gauche « morale » prétend trouver des titres de noblesse, et disqualifier la droite, et ce qu'elle désigne comme « l'extrême droite » qui se seraient disqualifiées durant la seconde guerre mondiale en collaborant avec les nazis.
L'article qui suit, de Stéphane Courtois, éminent historien, spécialiste de l'histoire contemporaine, remet les pendules à l'heure, à propos des déclarations en 2012 d'un député UMP Thierry Solère ( maintenant républicain ) qui adopte sur le camp auquel il est censé appartenir les propos du parti du BIEN ( la gauche évidemment ) et qui s'étonne d'être pris en sandwich entre ladite gauche, et le Front National, où se réfugient beaucoup de Français qui déplorent de plus en plus les petits ( et grands ) accommodements de nos élus avec la vérité.
Mais je vous laisse lire.
Le Scrutateur.
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Qui est Stéphane Courtois ?
Stéphane Courtois est un historien et universitaire.
Il est directeur de recherche au CNRS (Université de Paris X), professeur à l'Institut Catholique d'Études Supérieures (ICES) de La Roche-sur-Yon, spécialiste de l'histoire des mouvances et des régimes communistes.
On lui doit notamment Le bolchevisme à la française (Fayard - 2010
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Comment peut-on être assez ignorant pour croire encore que les “collabos” venaient tous
de l’extrême-droite et les résistants de la gauche ?
« L’extrême gauche en France était dans la résistance. L’extrême droite française était à l’époque dans la collaboration », c'est ainsi que Thierry Solère, député de l’UMP, a voulu distinguer l'extrême-droite de l'extrême gauche. Stéphane Courtois lui rappelle donc quelques petits faits historiques...
e ne fais pas de politique et ne tiens pas à interférer dans les débats internes de l’UMP, mais je ne peux pas laisser sans réagir la déclaration de M. Thierry Solère, député de l’UMP qui vient de déclarer : « L’extrême gauche en France était dans la résistance. L’extrême droite française était à l’époque dans la collaboration. » Déclaration qui laisse pantois l’historien spécialiste de la période de la Deuxième Guerre mondiale, surtout venant d’un député appartenant à un parti réputé « gaulliste » et donc, en principe, concerné par l’histoire de l’Occupation, du régime de Vichy et de la Résistance.
M. Solère semble ignorer qu’en 1939, l’extrême gauche alors représentée par le Parti communiste fut interdite dès le 26 septembre 1939 par le gouvernement de la République dirigé par un chef du Front populaire — M. Daladier — pour avoir approuvé l’alliance entre Hitler et Staline, conclue le 23 août 1939 et qui aboutit, le 1er septembre, à l’attaque allemande contre la Pologne et surtout, le 17 septembre, à l’invasion de la Pologne par l’URSS.
M. Solère semble ignorer que le 1er octobre 1939, Jacques Duclos, dirigeant du PCF, diffusa une lettre ouverte invitant le gouvernement à engager d’urgence des négociations de paix avec l’Allemagne nazie, avec qui la France était en guerre depuis le 2 septembre, ce qui entraina la condamnation de 44 députés communistes en mars 1940.
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M. Solère semble ignorer que dans la nuit du 3 au 4 octobre 1939, Maurice Thorez, secrétaire général du PCF, fut enlevé à son régiment par un commando de l’Internationale communiste et, sous passeport soviétique, passa en URSS où il demeura de 1939 à 1944. Pour cette désertion en temps de guerre il fut condamné par contumace et déchu de la nationalité française.
M. Solère semble ignorer que le 18 juin 1940 — au moment même où le général de Gaulle lançait son premier appel à la résistance —, un dirigeant du PCF, sur ordre de Moscou et sous l’autorité de Duclos, prenait contact avec les services allemands, installés place de l’Opéra à Paris depuis deux jours, et engageait avec Otto Abetz, le représentant de Hitler à Paris, une négociation politique qui dura jusqu’à la mi-août.
M. Solère semble ignorer que si le PCF critiqua violemment le régime de Vichy, il n’est entré dans la résistance active à l’occupant qu’en juin 1941. Tout ceci n’enlève rien aux sacrifices des militants communistes entre 1941 et 1944, mais l’extrême gauche communiste a été largement absente du combat contre l’Allemagne nazie entre septembre 1939 et juin 1941.
M. Solère semble ignorer que de très nombreux hommes politiques de gauche — radicaux, socialistes — ont voté les pleins pouvoirs à Pétain et ont participé à son Conseil national, quand ils n’ont pas été des collaborationnistes actifs, en particuliers ceux qu’on appelait les néo-socialistes (Déat, etc.).
Enfin, M. Solère utilise une expression — « l’extrême droite » — qui ne signifie rien. Que dire de tous ces premiers résistants qui étaient des monarchistes de l’Action française — Daniel Cordier, le secrétaire de Jean Moulin, De Vawrin le chef du BCRA (le service secret gaulliste), le fameux colonel Rémy premier agent du général de Gaulle en France occupée —, voire issus de la mouvance de la Cagoule — Guillain de Bénouville, chef du mouvement Combat, François Mitterrand ? Avec la défaite et l’occupation, « l’extrême droite » a éclaté en plusieurs courants, les uns allant vers la révolution totalitaire nazie (Doriot et son PPF), les autres vers le régime réactionnaire et autoritaire de Vichy bientôt engagé dans la collaboration, et les troisièmes entrant tête baissée dans la Résistance par nationalisme et détestation de l’Allemagne pangermanique. Le général de Gaulle lui-même était un conservateur catholique et nationaliste, violemment critiqué pour cela, encore en juin 1941, par les communistes français : c’est pourtant lui qui a lancé le cri de ralliement initial et a dirigé de main de maître le combat pour que la France retrouve sa place de nation indépendante à la Libération.
De grâce, Monsieur le Député, faites preuve d’un peu plus de culture historique avant de lancer des anathèmes.
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