Blog destiné à commenter l'actualité, politique, économique, culturelle, sportive, etc, dans un esprit de critique philosophique, d'esprit chrétien et français.La collaboration des lecteurs est souhaitée, de même que la courtoisie, et l'esprit de tolérance.
3 Janvier 2015
Chaque semaine l’hebdomadaire Valeurs Actuelles publie une chronique délicieuse et très bien informée. L’auteur use d’un pseudonyme emprunté à l’œuvre de Balzac, celui d’un personnage de la Comédie humaine, jeune aristocrate, M. de Rastignac.
Notre Rastignac contemporain commente l’actualité ( le plus souvent politique ), dans le style d’un observateur attentif, débordant d’un humour caustique, qui n’est pas pour déplaire au Scrutateur. Rien de ce qui se passe à l’Elysée, mais aussi, dans l’ensemble de la France, et spécialement de ce qui se cache en coulisses, ( le plus important très souvent ) ne lui échappe.
Nos politiciens, journalistes, et plumitifs à gages sont désignés par des noms empruntés à l’épopée balzacienne. Par exemple celui de cette semaine est Louis-Némorin Ditroux, que vous n’hésiterez pas à reconnaître, pas plus que ceux de François de la Haye ( Hélas ! Hélas ! Hélas ! ), de Martial Kropoly ( hum ! hum !), de Robert d’Arbrissel ( qui renvoie au Moyen-âge et à Saint Bernard ), ou encore d’Amphytrite du Halga, fille d’un célèbre chevalier du Halga, connu, pour son allant, et ses saillies parfois …discutées.
Lisez, car l’humour et l’ironie sont parfois les seuls moyens de se tenir informé sans….vomir.
Le Scrutateur.
La Chronique de M. de Rastignac.
Que vous souhaiter, mon cousin, en cette année qui commence ? Une fois encore, la patience sera la vertu indispensable pour supporter les vents contraires et traverser l'océan de médiocrité qu'est devenue la politique. Le conseiller de canton installé au Château continuera ses boniments, les députés jacobins feront mine d'y croire, mais dans le secret de tous les esprits résonneront encore les trois mots que le temps aiguise chaque jour un peu plus et qui peuvent, en une seconde, glisser sur le bois du destin. Ces trois mots, les voici : dissolution, cohabitation, démission.
Certes, François de La Haye n'a pas le profil aventureux et a toujours préféré les courants paisibles aux torrents romanesques, mais nous vivons des temps violents et la fatalité ne s'encombre pas toujours des petits calculs des habiles. Il fera tout, croyez-moi, pour éviter une telle humiliation et la fortune lui donnera peut-être un précieux répit, mais, soyez-en sûr, quelques barreaux de plus sur l'échelle de la renommée ne transformeront pas un président de hasard en prince incontesté. Dans les sections, sachez-le, chacun se prépare au pire et si vous passez du côté de la Chambre, vous entendrez des députés jacobins vous confier la certitude de leur défaite. Une seule chose les obsède : trouver un rivage où s'échouer après le naufrage.
Si la politique était une mécanique, si les êtres humains étaient aussi constants que les aiguilles d'une horloge, nous pourrions déjà retirer la couronne du chef de François de La Haye pour la poser sur celui de Martial Kropoly. Las, la France n'est pas la Suisse et le mouvement des ambitions, la roue du destin obéissent à des lois auxquelles les pauvres aiguilles ne peuvent rien.
a u pied des Pyrénées, il est un homme qui a médité plus qu'aucun philosophe ces mystères du temps et de l'Histoire. Il fut pendant longtemps l'une des figures les plus écoutées de Paris et rares sont ceux qui sur la table de jeu n'ont pas posé, un jour, un jeton sur le numéro de Louis-Némorin Ditroux. À chaque fois, il a perdu, à chaque fois, confiait-il, il aurait pu gagner. L'eau du gave de Pau depuis a coulé, ses troupes se sont dispersées, ses lieutenants l'ont trahi un à un, l'homme n'est plus député... et pourtant ! Il suffit d'entendre le débit fragile et conquérant tout à la fois du Béarnais pour comprendre qu'il n'a rien perdu de son autorité et de son assurance.
Un de nos plus brillants romanciers, dans un livre qui fera, sachez-le, un immense scandale, en fait le président du Conseil d'une France devenue mahométane. Rassurez-vous, ce n'est, pour le moment, que de la littérature, mais l'on me dit que Louis-Némorin Ditroux a trouvé dans ce roman un nouveau motif de méditation.
Je ne puis encore tout vous dire, mais je sais une des certitudes sur laquelle le Béarnais prend appui. Vous savez qu'il est un grand admirateur d'Henri IV et un fin connaisseur des guerres de Religion. Le temps qu'il voit venir sera aussi tourmenté que le fut celui de Catherine de Médicis, « tout y est fou, déséquilibré», explique-t-il, et lui veut être le point d'équilibre qui empêchera notre pays de sombrer dans la guerre civile. La vision est encore un peu floue, mais ce paysan a trouvé un sillon qu'il compte bien creuser jusqu'à la prochaine grande élection.
Pour observer les choses en surplomb comme un penseur antique, Louis-Némorin Ditroux n'a rien perdu de son habileté d'orléaniste. Initié, plus qu'aucun autre, à la cryptologie électorale et aux mouvements mystérieux des urnes, il a compris que n'étant ni jacobin ni unioniste, il ne sera soumis à aucune élection préalable. À bâbord, il se soucie peu de celui ou celle qui sera candidat, à tribord, il souhaite ardemment la victoire de Martial Kropoly sur Robert d'Arbrissel. Imaginez, il serait alors le réceptacle de ceux qui ne veulent plus des jacobins, refusent d'ouvrir une fois encore le Château à Martial Kropoly et tremblent à l'idée de voir madame du Halga sur la plus haute marche.
Il n'y a que M. Ditroux pour mêler ainsi la minuscule tactique et les foucades de la Providence. Pour le moment, il convient d'en rire et de rappeler qu'il n'y a rien à craindre du petit maire de Pau. Je dois cependant vous confier qu'ils sont plus nombreux que l'on croit, à Paris, à garder à l'esprit le profil du Béarnais. Nul ne peut savoir, à l'heure où j'achève cette lettre, s'il sera, pour son retour, terriblement démodé ou si ses épaules robustes surmontées d'un visage rassurant incarneront nos provinces et nos campagnes. S'il chante les grandeurs du Coran et l'ouverture de nos frontières, s'il fait mine d'être jacobin, croyez-moi, il n'y aura plus personne pour l'applaudir. Mais s'il se fait la voix raisonnable de la France désolée et meurtrie, celle que Paris méprise et qui ne veut pas disparaître, il serait fort prudent, mon cousin, de se méfier de M. Ditroux...
François de La Haye : chef de l'État-, Martial Kropoly président des unionistes; Robert d'Arbrissel: maire de Bordeaux ;Amphytrite du Halga: présidente desfrontistes.
82 - Valeurs actuelles 1er ja